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N.B. : Les illustrations et les articles tirés du magasine Canadian Illustrated News reflètent le point de vue des artistes, des auteurs et des rédacteurs en chef qui les ont créés, ainsi que l'époque où ils l'ont été. Ils ne représentent en aucune façon les vues de Bibliothèque et Archives Canada.
Table des matières : Canadian Illustrated News
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Image digitalisée de la page 402 : Mot d'adieu
Nous avons le regret d'annoncer qu'après la présente édition la publication du Canadian Illustrated News sera discontinuée. Le journal a été fondé il y a treize ans. Il s'est donc écoulé une période suffisamment longue pour effectuer une bonne mise à l'essai. La raison de la cessation est bien simple : le Canadian Illustrated News n'est pas rentable pour l'entreprise qui le publie. Tous les efforts ont été faits pour obtenir des résultats; nous avons investi de très grosses sommes d'argent tant dans le département artistique que dans celui de la typographie, ainsi que pour les aspects matériels du papier et de la typographie, des dépenses sûrement égales à celles des autres journaux illustrés de ce continent.
Il est tout à fait naturel que les lecteurs du News soient les meilleurs juges du degré de succès atteint grâce aux investissements en argent et en travail auxquels nous avons fait référence. Nous devons tous nos remerciements à nos abonnés et à nos lecteurs loyaux qui pendant les années que nous avons mentionnées se sont acquittés rapidement de leurs obligations. Toutefois, il y a eu malheureusement une autre classe d'abonnés; - ceux qui n'ont pas respecté les engagements qu'ils avaient pris et, en grande partie, c'est à eux que nous devons l'annonce que nous faisons actuellement.
Il y a un autre point de vue. Il se peut que la population canadienne ne soit pas encore assez nombreuse pour permettre la publication d'un magazine illustré hebdomadaire. Il est certain qu'aux États-Unis la population était cinq ou six fois plus élevée que celle du Canada avant qu'un journal illustré soit rentable là-bas. Les journaux illustrés d'Australie constituent une exception évidente à cet argument. Toutefois, il faut remarquer que l'avoir par personne en Australie est exceptionnel en plus du fait que les colonies de peuplement sont rapprochées.
Ceux de nos abonnés qui ont payé à l'avance seront remboursés dès la fermeture des livres. Nous nous attendons, cependant, à ce que ceux qui n'ont pas payé, mais qui ont accumulé des arriérés, nous payent; ces gens comprendront naturellement que nous insisterons pour recevoir l'argent dû.
Il ne nous reste qu'à dire à tous nos lecteurs ce mot « inévitable, nécessaire et imminent : Adieu! »
Image digitalisée de la page 402 : Bonne et heureuse année
Une autre année se termine et nous sommes à la veille de douze mois riches en activités. Nous profitons de cette occasion pour souhaiter à nos lecteurs et à nos clients tous nos meilleurs vœux. C'est la période de l'année où nous rassemblons naturellement nos pensées pour nous souvenir et faire un examen intérieur en vue de réfléchir sur ce que nous avons fait dans le passé et décider de notre conduite à l'avenir. Notre cœur s'adoucit durant cette période lorsque nous renouons ou que nous renforçons des liens, lorsque nous oublions les querelles et que nous sommes attirés par cette touche de nature qui fait de toute la planète notre famille. Il est agréable de savoir qu'il existe un tel moment de soulagement, au moins une fois par année, et, pour ce qui est de nous, nous faisons appel à notre cœur, une fois de plus, pour souhaiter à nos amis nos meilleurs vœux pour l'année à venir.
Image digitalisée de la page 402 : Le sport chez les citadins [traduction]
Les caractéristiques naturelles de la vie à la campagne sont les plus favorables à la santé. Les conditions artificielles, elles, ne sont pas toujours idéales. Même dans nos petites villes, l'organisation sociale n'est pas assez ferme ni assez assurée pour s'engager de pied ferme dans des programmes d'éducation approfondie du corps et, pour ce qui est de la vie à la ferme, il se dit bien des fables sur ce mode de vie arcadien. La mauvaise alimentation et une mauvaise organisation du travail sont la règle sur nos fermes américaines. Le pain Salæratus, les pâtisseries lourdes et les viandes frites ne sont pas le meilleur régime alimentaire pour un athlète. Et que le jeune fermier sarcle, qu'il bine, qu'il creuse ou qu'il enfourche du foin, son travail n'est guère plus sain que celui des hommes qui creusent des tranchées le long de nos boulevards pour y installer des tuyaux.
Un examen approfondi des faits pourrait convaincre l'homme le plus attaché aux illusions de son enfance que le citoyen des villes n'est pas forcément une épave. Ce qu'on appelle communément le « sport amateur » peut être le salut de la grâce musculaire du citadin. Mais même ceux qui connaissent assez bien le sujet seront étonnés d'apprendre dans quelle mesure et avec quel succès les jeunes New Yorkais recherchent cette grâce, et montreront quelque incrédulité à l'affirmation que New York est en voie de devenir la capitale mondiale du sport amateur.
Cela peut bien sembler un peu surprenant, mais c'est la vérité. Tout d'abord, Dame Nature a offert à l'enfant de Manhattan tout ce qu'il est possible d'avoir pour faire de ses moments de récréation, littéralement, des occasions de re-création - l'apparition d'une nouvelle vigueur du corps, dont le développement est contrôlé par la technique de la gymnastique. On dirait presque que le plan original de l'île de New York et de la région environnante avait été dressé à cette seule fin.
Il n'y a qu'à observer la carte. Au sud de l'île longiligne au dos montant sur laquelle est sise la ville se trouve une large baie dans laquelle se jettent deux rivières. La baie s'ouvre, par un passage nommé à tort « Narrows », sur une autre baie encore plus vaste dont la large ouverture est une porte sur l'océan. Cette étendue d'eau offre des possibilités à toutes sortes et à toutes formes d'embarcations, du canoë au Cunarder. Des deux rivières, la plus grande a été décrite comme « la plus large des rivières de cette envergure » du monde entier. Elle est large, profonde, son courant est vif et il y coule assez d'eau pour faire une rivière Ohio ou Rio Grande, si elle était harnachée à la mode occidentale. À New York, elle doit s'ouvrir sur quelques lacs situés au nord de l'État.
L'autre rivière prête son large courant aux exigences des commerces du centre-ville avant de se diviser avec obligeance pour s'ouvrir d'un côté en un puissant détroit et, de l'autre, en un ruisseau peu profond, idéal pour les promenades en chaloupe.
Deux bonnes routes mènent de la ville elle-même vers la banlieue nord où les nouveaux quartiers de Westchester offrent des terrains où peuvent se pratiquer de façon relativement économique les jeux de balle et les courses. Il peut y avoir des terrains, également, à Staten Island, au sud, ou dans le Jersey, à l'ouest, où se trouvent les meilleures pistes pour la pratique de la bicyclette qu'il y ait de ce côté-ci de Boston. De plus, les cueilleurs d'anis ont tout Long Island pour s'adonner à leur passe-temps.
Mais le jeune New Yorkais profite-t-il de ces avantages? Voyons cela. En 1868, il n'existait qu'un seul club sportif à New York. L'année précédente, il n'y en avait aucun. Cette flambée soudaine est venue de la création du New York Athletic Club qui avait, à l'époque, fait des gorges chaudes. De nos jours, cette marque de 1867 est dépassée par sept fois, si l'on compte le Staten Island Athletic Club. Ce sont des clubs d'athlétisme purs et simples, des clubs qui encouragent la pratique de tous les sports virils. Le nombre de clubs qui se spécialisent dans une forme d'exercice ne se compte plus. Il y a les clubs d'aviron, les clubs nautiques, les clubs de cyclisme, les clubs de tennis sur gazon, les clubs de sports de raquette, les clubs de croquet, les clubs de tir à l'arc, les clubs de marche, les clubs de crosse, les clubs de curling, les clubs de patinage, les clubs d'équitation, les clubs de tir au fusil ou au pistolet, les clubs de base-ball et de cricket, les clubs de pêche, les clubs de quilles, les clubs de polo et des massues pour les gens « libres ».
Numéroter et nommer ces clubs pourrait constituer un chapitre du genre des générations d'Enoch et, au mieux, donner une idée trompeuse de la pièce. Car ce ne sont que quelques-unes des plus grandes associations qui peuvent fournir une preuve documentaire de la qualité de leurs membres et de leurs réalisations et ce sont, en un certain sens, les moins intéressantes et les moins importantes de toutes. Bien sûr, le super club est la norme, le critère, le brillant exemple à suivre pour toute une gamme de clubs de moins grande envergure; cependant, les muscles se gonflent et la santé s'améliore aussi dans les petites organisations sans prétention dont les noms ne figurent jamais dans les journaux, dont les « statuts et règlements » ne sont pas imprimés dans de petits livres, dont les membres ne font jamais « baisser le record » ni ne décorent leur large poitrail d'écussons d'or.
À la lecture du Herald ou, plus vraisemblablement, du News ou du Journal ou de quelque autre quotidien particulièrement « populaire », on peut voir ici et là de brefs articles déclarant que les employés de Smith Manufacturing Co. ont battu les membres du Jones, Brown and Robinson Brothers Club à une course de bateau ou à une partie de base-ball. Par contre, on n'entendra jamais parler de ces jeunes sportifs vigoureux aux jeux du printemps ni aux rencontres annuelles des clubs sportifs de New York ou de Manhattan; jamais un de ces coureurs n'ira faire trembler M. Myers pour ses lauriers; les fantômes des anciens Atlantics originaux pourraient lancer, recevoir et frapper avec assez d'adresse pour les faire sombrer dans l'oubli aux jeux nationaux; mais ils sont, en fait, les athlètes les plus authentiques de tous. Ils ne recherchent pas la célébrité semi-professionnelle; les applaudissements de leurs amis - particulièrement de leurs jeunes amies - et ces petits encarts dans les journaux qu'ils prisent le plus sont toute la gloire et la célébrité qu'ils récoltent. Ils s'évertuent avec modestie au nom de la vigueur et de la santé, et ils les ont.
Il existe de tels clubs dans la plupart des grands établissements mercantiles et manufacturiers, qui se mesurent les uns aux autres dans un esprit plus ou moins amical. Il règne une certaine rivalité sociale entre diverses compagnies du même secteur, et souvent même entre diverses sections d'une même compagnie. Les compositeurs luttent contre les opérateurs de presse, les tisseurs contre les teinturiers, les préposés des grossistes contre ceux des détaillants. Un matin, on peut lire dans le Sun ou le Star qu'un certain lithographe vaillant, par exemple, propose une course à l'aviron ou un match de lutte à n'importe quel autre lithographe pour le titre de champion des lithographes. On apprend ainsi, parfois, des noms et des titres étranges et mystérieux, dont le grand public n'aurait jamais eu l'idée. On pourrait lire, par exemple, qu'un « double-blaseur » qui souhaite être reconnu comme le plus fort des double-blaseurs de New York défie n'importe quel autre double-blaseur, même le plus musclé, qui voudra bien se mesurer à lui sur un terrain paisible où les double-blaseurs vont généralement « tirer » ou « lancer le marteau ». Le terrain paisible est généralement un petit parc Schützen ou une aire de pique-nique de Harlem, ou de l'autre côté de la rivière dans le Jersey.
Il est naturel que les hommes qui gagnent leur vie avec un métier manuel et qui, littéralement, gagnent leur pain à la sueur de leur front soient des athlètes. De même, les clubs sportifs des régiments militaires peuvent être perçus comme allant de soi. Et nous connaissons tous - malheureusement, peut-être - le caractère apparemment indissociable de l'éducation collégiale et de l'éducation sportive. Mais il est étonnant de voir comment la manie de former des associations pour la pratique de l'exercice physique s'est répandue dans toutes les couches sociales d'une grande ville. Les jeunes hommes d'un certain quartier se réunissent et organisent à la bonne franquette de petits clubs de base-ball ou de cricket; la création d'une bonne salle de quilles laisse prévoir l'apparition d'une demi-douzaine de nouveaux clubs de quilles, dont chacun a sa soirée réservée, et où chacun a l'exclusivité de la salle; à Murray Hill, où le base-ball et le jeu des dix quilles ne sont pas tenus en haute estime, les jeunes hommes et les jeunes femmes de chaque petit « set » gagnent souplesse, grâce et vigueur en vue des danses allemandes du soir avec la pratique du tennis sur gazon dans les manèges militaires ou les salles publiques disponibles à petit prix durant la journée; c'est ainsi qu'ils acquièrent les compétences semi-professionnelles qu'ils exhibent à l'occasion des matchs de championnat tenus à Newport.
Comme ces rassemblements d'adeptes de la musculation ne visent pas à attirer l'attention publique et que leur existence en tant que groupe ne dépasse que rarement la limite de deux ou de trois années - les jeunes hommes mûrissent et se marient, les salles de quilles sont fréquentées par des foules d'autres jeunes et lorgnées par les promoteurs immobiliers, les amitiés sociales s'évanouissent et s'éteignent en l'espace d'une saison -, il n'est pas toujours facile d'avoir des preuves visuelles de l'existence de ces clubs très privés. Cependant, si vous voulez voir le club West Ninety-sixth Street Base-ball Nine à l'œuvre, il vous suffit de vous rendre n'importe quel samedi après-midi sur les terrains vagues du Jersey, entre Hoboken et Guttenburg, et vous verrez un groupe de jeunes hommes, dont l'uniformité de la mise ne va pas plus loin qu'une affection généralisée pour les manches chemisier, qui mènent le jeu avec des bruits très peu professionnels. Ils ne portent pas de chaussettes rouges ni de chemises de flanelle affichant bien lisiblement leurs initiales; ils forment cependant un club et ils accordent grand prix à la dignité. Ils ont un capitaine et un trésorier, qui est aussi leur secrétaire et qui encaisse les amendes. C'est vrai, ils forment un club, et à la saison prochaine ils iront au fin fond du Jersey se mesurer aux Oriole Stockings de South Orange Junction et joueront pour la première fois sur un terrain officiel. Et alors, si ça se trouve, leur lanceur vedette pourrait bien se distinguer, ou un joueur au champ faire une belle défensive et, qui sait, dans un an ou deux, on pourrait le revoir sur les terrains de polo, revêtu d'un magnifique uniforme, crouler sous les applaudissements de milliers de spectateurs.
La salle de quilles est généralement adjacente à ce qu'on appelle un « beer garden ». C'est une appellation quelque peu curieuse. La bière (« beer ») y existe bel et bien, mais le jardin (« garden ») n'est guère qu'un petit carré de terrain orné de deux aloès malingres - car il semble que pour consommer de la bonne bière il faut être près d'un buisson quelconque. Au-delà de cet espace restreint - « un carré de terre peu familier à la végétation » -, se trouve aussi une allée de quilles, généralement construite de bois vert, qui gauchit avec le passage des ans et se fendille avec le passage des quilles. C'est là que la petite coterie d'amis se retrouve les soirs qui lui sont réservés. Le club dispose de son propre tableau de pointage, sur lequel les noms des joueurs figurent en lettres peintes. Le propriétaire fournit généralement quelque petite collation et les joueurs paient leurs consommations - modérées, car l'exercice est l'ennemi juré de l'ivrognerie - et, à la fin de la soirée, les frais de la rencontre, consistant en la location de la salle et le service de préposés, sont répartis entre tous les participants. La taxe peut monter à cinquante cents par personne environ.
Les Allemands sont les champions de quilles de la ville, et ce sont eux qui ont fait la popularité de ce passe-temps; cependant, ils ont gâté la bonne vieille méthode de jeu américaine en introduisant les imposantes boules, comme celles que Thor aimerait rouler à Walhalla, percées de deux trous adjacents; le joueur insère son pouce dans l'un et deux doigts dans l'autre. Cela réduit au minimum la difficulté du jeu et n'en fait plus qu'une affaire de force brute. N'importe quel géant obèse qui peut soulever l'une de ces énormes sphères et la lancer en plein centre de l'allée peut se fier à sa grosseur et à la vitesse qu'elle doit atteindre pour pouvoir faire tomber la plupart des quilles. Oh, qu'elles nous manquent ces boules anciennes, guère plus grosses qu'une balle de croquet lovée dans la paume de la main des jeux de nos pères! Les abats et les réserves étaient moins courants alors, mais lorsqu'un joueur faisait tableau net, il avait de quoi en tirer orgueil. Disons tout de même, pour nos amis allemands, que leur jeu est plus complexe que le nôtre et qu'une simple rencontre du club signifie l'annonce d'un tournoi prolongé, qui peut durer de quatre à cinq heures, et dont l'organisation est bien plus scientifique que nos simples concours.
Cependant, le club menacé de disparaître, le club le plus sensible au passage du temps, est le club de tennis. Ce n'est pas dû à une quelconque modestie; il s'appelle probablement le « True Knickerbocker Tennis Club » ou encore l'« Original Mayflower Racketeer ». Le fait est, cependant, qu'il « squatte » depuis un an ou deux, paisiblement et discrètement, l'un des manèges militaires, et il sait fort bien que le gouvernement de l'État voit avec forte désapprobation l'occupation par de tels locataires frivoles. Et voilà que les détenteurs du pouvoir d'Albany sont si résolus que les planchers vernis et les hauts plafonds des salles d'exercice du régiment sont maintenant presque des plaisirs du passé pour le joueur de tennis, qui se voit désormais obligé de louer les salles où il peut étendre ses innocents filets.
Maintenant, il n'existe pas beaucoup de salles pouvant convenir au jeu de tennis à New York et, lorsqu'il s'en trouve une, c'est faire preuve de sagesse pour les « True Knickerbockers » de ne rien dire de leur trouvaille au risque de voir les « Autediluvian Aristocrats » surenchérir et s'arroger le trophée. C'est donc dire que le club de tennis « audacieux » se cache et poursuit son entraînement jusqu'au crépuscule d'une retraite dorée, et ses membres vont chercher du bon temps ailleurs, glissant dans leur coupé avec monogramme le long de l'Avenue A à la recherche d'une boule standard roulant sur les planchers cirés de Klumpenheimer Hall, où le soir les belles de Bowery dansent au rythme de deux violons et d'un piano, au bal annuel de la Coterie no 2 de McGeoghegan.
Il est assez étonnant que les plus petites salles, les salles de réunion, de bal et de conférence qui abondent dans toute la ville ne soient pas plus utilisées. Elles ne conviennent pas au jeu de tennis, mais seraient idéales pour la pratique d'exercices de gymnastique, d'escrime, de forte-épée et d'estacade à pièces simples et pour les matchs de lutte ou de boxe. Elles sont disponibles, en journée, pour un dollar ou deux l'heure, parfois même moins. Il y a toujours un concierge qui, pour d'infimes honoraires, peut entretenir les équipements de la bataille; les participants peuvent ainsi se rencontrer à l'heure dite sans avoir besoin d'attirer péniblement le regard du public en circulant dans les rues munis de gants de boxe ou chargés d'épées. Bien entendu, les occupants de la salle peuvent en fermer les portes et jouir de la plus stricte intimité.
Le grand professeur d'escrime de New York est M. Senac, mais il y en a bien d'autres de moindre renommée. Quant aux gentlemen qui vouent leur vie à la diffusion de la connaissance de l'art viril, ils sont innombrables. Quiconque souhaite apprendre à boxer n'aura pas la moindre difficulté à trouver quelque part quelqu'un se faisant appeler « Mouse » ou « Chicken », qui sera trop heureux de se faire instructeur à vil prix et aussi de vendre à son élève une paire de gants pour vingt-cinq pour cent de plus qu'il aurait payé dans une boutique d'articles de sport. Mettons cependant en garde les jeunes disciples dont les professeurs sont reconnus pour être des « cogneurs ». La connaissance du sport tant prisé des Britanniques pourrait s'acquérir au prix de quelques dents de devant et du respect de soi. Il n'est pas sage de trop se fier à l'assurance de recevoir de la part de l'instructeur un « traitement de gentleman ». Beaucoup de jeunes qui déambulent dans les rues de notre ville ont eu pour « traitement » des yeux au beurre noir et le nez cassé par des gentlemen « Mouse » et « Chicken », dont le saint patron est le marquis de Queensberry. Il existe de bons professeurs compétents, cependant, qui sauront enseigner à un homme l'usage de ses poings en l'espace d'une ou de deux douzaines de leçons, pour un ou deux dollars la leçon.
Si le jeune citadin est vraiment décidé à faire du sport, la meilleure chose pour lui est certainement de s'assurer de faire durer son enthousiasme en se joignant à une société par actions. L'exercice pratiqué en solitaire peut devenir fastidieux à la fin; il devient un simple travail, et même du travail déplaisant. Le membre d'un club, par contre, que ce soit un gros ou un petit club, jouit de la camaraderie, de la stimulation de la compétition; il reçoit des conseils, des encouragements et de l'aide et, par conséquent, tire plaisir de tout ce qu'il fait et supporte, de toute la sueur et de tous les frissons qu'il connaît pour se distinguer ou même dépasser ses limites. Rien de très surprenant non plus que l'éclat d'une médaille d'or ou d'une coupe d'argent stimule son désir d'atteindre le but.
Image digitalisée de la page 403 : Le sport chez les citadins (suite) [traduction]
Bien entendu, il existe des préjugés, pour la plupart chez les mères couveuses et les tantes restées vieilles filles timorées, à l'égard des clubs sportifs comme éducateurs physiques. L'œuvre de M. Wilkie Collins, Man and Wife, avec son illustration frappante de la chute de M. Geoffrey Delamayne, a su effrayer bon nombre d'excellentes vieilles dames qui se laissent troubler par les visions d'entraîneurs brutaux et d'associés sans manières - d'« étranges gentlemen » comme ceux qui troublaient la paix de la comtesse, née Kilmansegg, qui étaient
« de la lignée fantaisiste
et qui aimaient l'eau-de-vie plutôt que le vin;
et ils appelaient son chien de salon Wenus ».
En ce qui concerne le réseau de clubs sportifs de New York, c'est un préjugé sans fondement en vérité. De temps en temps, peut-être, les grandes ambitions chutent, s'ébrèchent ou se heurtent; mais un jeune homme a de plus grandes chances d'être sain, tant moralement que physiquement, dans un club qu'en dehors. L'entraînement physique est, dans un sens négatif, un exercice moral. L'homme qui s'entraîne doit se lever tôt, se méfier de la goutte qui fait déborder le vase et, généralement, mener une vie sobre et modérée. Il est à la charge d'un entraîneur professionnel qui veille à ce qu'il ne s'épuise pas. Le regard collectif du club pèse sur lui. Il le surveille, à l'affût de ses aptitudes particulières, de ce qu'il sait le mieux faire. Il est encouragé à avoir un comportement judicieux. S'il entreprend de représenter son club à un concours général, il importe à tous les membres du club qu'il soit dans la meilleure position possible pour défendre son honneur. Ses camarades sont des jeunes hommes de dix-huit à vingt-cinq ans, avec quelques anciens dont la grande sagesse donne quelque mesure à l'enthousiasme brut de la jeunesse. Ces jeunes hommes sont commis ou avocats ou quelque chose du genre; la plupart sont des Américains et les autres, principalement des Allemands et des Irlandais de la meilleure lignée.
Non, les jeunes hommes ne courent pas de risque en cette compagnie et ils peuvent décider avec quelle classe ou quel clan de sportifs amateurs ils veulent pratiquer le sport de leur choix. La liste est assez longue.
Au haut de cette liste devrait figurer, par droit d'ancienneté, le New York Athletic Club. Fondé en 1868, il est maintenant un Nestor aux tempes argentées parmi la jeune génération des clubs. Il a déposé ses lauriers sur les rives de Harlem Creek et laisse à ses jeunes membres le soin de lutter pour l'obtention des médailles, des coupes et des titres de championnat. Il règne une atmosphère de tranquille et exclusive respectabilité dans les salles de son chalet propret au décor soigné et sur ses vastes terrains du côté de Mott Haven de Harlem. Il paraît, dans l'ensemble, trop confortable et conservateur pour ne jamais avoir été le pionnier radical du sport amateur, avec une tradition de piètres parties, auxquelles assistait un maigre public, généralement boudées et négligées par les New Yorkais conservateurs et paresseux. Cependant, M. W.B. Curtis et M. H.E. Buermeyer, les fondateurs du club, sont encore là de nos jours pour raconter le bon vieux temps sur ce petit bout de terre de ce côté de la rivière; ils sont toujours des membres actifs du club, et l'on peut apercevoir leur visage familier à toutes les rencontres sportives.
Le N.Y.A.C. est à l'origine de la plupart des lois qui lient la National Association of Amateur Athletes of America, une ligue puissante dont les réunions législatives et de direction sont tenues pendant les jeux du printemps, le premier mercredi du mois de mai. Il n'en coûtera à un jeune homme bien parrainé que dix dollars de frais d'admission et vingt-cinq dollars de cotisation annuelle pour être membre de ce club et il pourra bientôt inviter ses amis au plus beau des chalets et à l'un des meilleurs gymnases du pays, situés, qui plus est, à l'intérieur des limites de la ville.
Le New York est le Sybaris des clubs de la ville, et le Manhattan peut être appelé le Sparta. Le Manhattan Club est à l'image d'un présent actif bâti sur un passé honorable. Il a été fondé en novembre 1877 et s'est mis à l'œuvre tôt l'année suivante avec quelques membres seulement. Ils sont maintenant environ 175, et le club connaît une croissance fort saine.
Le Manhattan détient l'emblème des championnats et il fait plus que toute autre organisation pour maintenir la popularité des sports. Il a deux « terrains », dont l'un est situé au croisement de Fifty-sixth Street et Eighth Avenue et l'autre, sur la même voie de circulation, exactement à un mille et demi au nord, sur Eighty-sixth Street. Ce dernier est, ou du moins sera, une fois fini, le plus vaste et le meilleur terrain en son genre. Il fait tout un quadrilatère et a assez d'espace pour qu'on y joue au base-ball, au football, à la crosse et au tennis sur gazon; il est doté d'une piste de course et de bicyclette d'un quart de mille ainsi que d'estrades ombragées et ventilées, où les demoiselles peuvent s'asseoir pour observer le jeu de leurs favoris vêtus de l'uniforme au motif de carreaux rouges et blancs. Si vous ne recherchez que le luxe et le loisir, vous devriez vous joindre au New York Club. Si vous voulez faire de l'exercice au nom de la santé, ou si vous recherchez la gloire à la course à pied, au saut à la perche ou au lancer du poids, mieux vaut vous inscrire au Manhattan Club, car ses membres voient grand. Ils ont raflé une grande partie des prix à tous les championnats et leur pays natal est trop petit pour contenir leur ambition. Ils envoient des équipes affronter les muscles des vigoureux Kanucks, et ils ont envoyé les célèbres Myers en Angleterre pour étouffer le grondement du lion britannique sous le cri de l'aigle américain. Pour couvrir les frais de cette aventure patriotique, ils ont organisé une série de jeux au Madison Square Garden, où Charles Rowell a exhibé à leur avantage le style de course qui lui a valu pendant des années le titre d'« invincible ».
En passant, Alcides Urban, si vous pensez qu'il faut un large gabarit pour être bon athlète, vous devriez bien regarder ces deux hommes. Le poids de L.E. Myers varie entre cent dix et cent vingt livres et le « grand » Rowell est un petit homme de stature napoléonienne dont rien n'est remarquable, à part ses jambes.
« Quel est, à votre avis, mon tour de poitrine? » m'a-t-il demandé.
« Une quarantaine de pouces, je suppose, quand vous vous entraînez. »
« Trente-cinq pouces », a répondu le champion. Il était le champion à l'époque.
Quant à Myers, le champion « sprinteur », ou coureur sur de courtes distances, il est l'image même du sportif amateur, et il vous fera volontiers un petit sermon sur le sujet si vous partez à sa recherche, déambulant les soirs d'été sur les vastes terrains au croisement de Eighty-sixth Street et de Eighth Avenue.
Oh non, Alcides, ce n'est pas ce que pense votre chère tante Cassandra lorsqu'elle entend le terme « athlète » - le « professionnel » provocateur et crâneur assoiffé de récompenses et qui attire les foules. Celui-ci a la silhouette d'un beau jeune homme de vingt-cinq ans. Ses yeux, ses dents, son sourire brillent; sa peau - le vêtement donne tout loisir à l'observation - est saine et brune. Le pouce et l'index du gant de pointure 7 d'un cadet pourrait faire le tour de ses minces chevilles; mais vous remarquerez que toute son ossature est fine; sa main est petite, son cou-de-pied est haut et il a le port gracieux; ses muscles sont souples, nets et vifs sous sa peau. C'est de la marchandise fine, et non pas faible. C'est cela, l'athlète amateur.
« Oui », dit-il dans un sourire, « c'est tout à fait exaspérant. Il y a des gens qui persistent à classer les athlètes amateurs au rang des professionnels. Ils me demandent si je peux battre Rowell! »
Si M. Myers devait se mesurer sur une piste de cent verges à M. Rowell, il pourrait bien être exclu à jamais du monde amateur.
« Ils ne peuvent pas comprendre que l'argent fait toute la différence entre les deux classes. Ces professionnels font du sport une affaire. Mais il n'y a rien de mercenaire dans l'ambition de l'amateur. La valeur qu'il donne à ses médailles et à ses coupes n'est pas pour l'or ni l'argent qui les recouvre, mais pour les accomplissements qu'elles représentent. Nous nous efforçons de faire de nos clubs quelque chose qui convienne aux gentlemen, et je crois que nous y parvenons. Nous sommes profondément démocratiques. Nous n'avons que faire de la fortune ni de la situation sociale d'un homme, mais nous exigeons de lui un comportement respectueux et courtois et une personnalité sans reproche. Nous avons toutes sortes de membres à notre club - la plupart des commis et de jeunes hommes d'affaires, mais aussi tous les autres - avocats, médecins, journalistes, courtiers - je ne sais pas. Ils semblent tous très bien s'entendre. »
« Tous de grands athlètes? Oh non! Beaucoup ne se sont joints au club que pour leur santé - pour faire un peu d'exercice. Bizarre pour eux d'évoluer parmi des hommes entraînés? Non, en fait. Les sportifs chevronnés les encouragent, les aident, leur donnent des conseils. Nous tenons à ce que tout ici soit agréable, naturellement. »
« Oui, j'ai toujours aimé le sport et, enfant, je dansais beaucoup. C'est, je crois, ce qui m'a donné des jambes fortes. De plus, j'ai ceci; ce sont mes muscles, et ils m'aident à courir. »
Et le voilà qui exhibe une paire de poignées d'amour anormales, une sur chaque hanche, débordant de son short de course.
« Non monsieur, personne n'en a de pareilles. C'est la seule paire au monde. Lorsque j'ai commencé à courir en amateur, j'étais en très mauvaise santé, apparemment aux premiers stades de la consomption. Personne ne pensait que j'allais survivre. J'étais brisé, malade, faible. Mais j'étais convaincu qu'il n'y avait qu'un seul moyen de recouvrer la santé - par l'exercice. Alors je me suis mis à courir, à sauter et à faire d'autres activités et j'y suis allé à pleine mesure, bien que, pendant un certain temps, la moindre fatigue me rendit très malade - enfin, me voici. Pas mal sain pour un type qui était aux portes de la mort il y a quelques années, non? Il n'y a pas beaucoup de consomption ici, n'est-ce pas? »
Et de gonfler un poitrail rebondi, petit mais sain.
« Parlons d'exercice maintenant. Eh bien! quinze minutes chaque jour suffirait à couvrir tout le temps que je passe à faire de l'exercice actif. Je viens ici, les belles soirées d'été, et je m'amuse à courir ou à lancer des poids avec les autres gars et, quand je suis fatigué, je m'arrête. »
« L'entraînement? Je ne me suis entraîné que deux fois, et chaque fois ça ne m'a pas réussi. Je mange et je bois comme tout homme raisonnable, en évitant simplement ce qui n'est pas sain - ce qu'on sait qui n'est pas bon pour nous. Je ne me prive de rien de bon, tant que ce n'est pas mauvais pour moi. Mais je ne fume pas et vous ne le devriez pas non plus. »
M. H.G. Crickmore est le grand « Kri » du monde du sport. « J'en connais plus sur les chevaux que sur les hommes », m'a-t-il dit l'autre jour ; « mais j'ai observé ces garçons. Je pense qu'ils feraient mieux de s'adonner à des courses de longue distance, à un rythme aisé et régulier, plutôt qu'au sprint et à ce genre d'exercice violent. Par contre, ils font un excellent boulot, comme tous les hommes qui s'efforcent de développer leur corps, d'accroître leur force physique et d'améliorer leur état général de santé. Ce travail se répercutera sur leurs enfants et leurs petits-enfants - sur une race d'hommes et de femmes plus sains et plus vigoureux. »
Le choix ne se limite pas à deux clubs sportifs. Il existe quatre petites associations actives dans la ville, dont l'existence, pour l'instant, ne vise que le développement de bons coureurs et marcheurs en vue des championnats, mais qui pourraient, avec l'augmentation du nombre de leurs membres, accroître la portée de leurs efforts. L'American Athletic Club est un groupe sans local d'athlètes nomades qui louent les installations d'autres clubs pour s'entraîner et s'exhiber jusqu'au jour où leur trésor leur permettra de louer des terrains convenant à l'érection des bâtiments nécessaires. Le A.A.C. est généralement perçu comme une copie du Young Men's Christian Association Gymnasium, et s'est surtout distingué pour avoir produit le jeune G.D. Baird, un marcheur très prometteur s'il n'use pas ses courtes jambes à la marche d'ici deux ou trois ans.
Le Pastime A.C. possède des terrains intéressants sur Sixty-sixth Street et East River. Il compte parmi ses membres M. Lambrecht, le champion lanceur de marteau et de poids lourds; Conolly, le champion boxeur poids lourd; et M. Nason, que ses collègues désignent fièrement comme le champion du monde de « course en sac ».
Le Gramercy est pratiquement un club de course à pied, et sa plus grande gloire est un grand coureur, Golden. Ce club n'a pas de terrains qui lui soient propres. Il en a à peine besoin. L'ensemble du continent, toutes frontières abattues, en tient lieu. En hiver, ses membres font de bonnes courses le long de la Hudson River - jusqu'à Peekskill, par exemple.
Le héros et président du West Side Athletic Club est William Meek, champion marcheur sur de longue distance. Le club a pris la place de l'ancien Scottish-American Club, sur Fifty-fourth Street, entre Eighth et Ninth Avenues. Les frais d'entrée, les cotisations et les frais d'évaluation, dans ces quatre clubs, sont infimes, en fait. Même les poches les moins garnies peuvent se les offrir.
Il y a tout de même plusieurs bons New Yorkais dans le cœur pour qui New York n'est qu'un endroit où faire de l'argent. Ils vivent dans les banlieues de la grande ville, dont les frontières doivent aller, disons, de Yonkers, passer par le comté de Westchester, contourner Long Island jusqu'à Coney Island, tourner encore pour englober Staten Island, puis traverser le New Jersey pour revenir au point de départ. C'est cela, vraiment, New York, et les résidents de ses banlieues ne sont pas exclus des avantages sportifs qui sont offerts à ceux qui vivent à l'intérieur de ses frontières. Vivez-vous à Yonkers? à Fordham? à New Rochelle? à Mount Vernon? Les terrains du New York Club et tous les hangars à bateaux de Harlem sont à votre portée.
Habitez-vous cette belle île située, comme un point sous le point d'exclamation tordu de Manhattan, loin au sud? Eh bien! vous avez le Staten Island Athletic Club, avec quelque deux cent cinquante apôtres du culte de la culotte courte. Ils possèdent un hangar à bateaux - avec des bateaux à l'intérieur aussi - à New Brighton, et des terrains de course et de base-ball à West Brighton. Ils ont englouti les anciens clubs d'aviron Hesper et Neptune et ils aspirent à la renommée aquatique.
Long Island, si vous êtes à Brooklyn ou à Williamsburg, peut vous offrir les privilèges du W.A.C. - une organisation des plus prometteuses et qui a du cran, âgée de six ans et dotée de plus de deux cents membres. Il est muni d'un terrain de camping commode au croisement de Wythe Avenue et de Penn Street, à Brooklyn, E.D. Il a, en outre, une piste dont la construction originale est inclinée du dedans vers l'extérieur, comme une courbe de voie ferrée. Il a aussi un gymnase et un entraîneur « vedette », Jack McMasters, et les jeux qu'il organise commencent à se faire une réputation de grands « événements ».
Si le destin vous envoie au New Jersey, vous pouvez vous joindre au Elizabeth A. C., d'un an le cadet du Williamsburg, qui compte à peu près le même nombre de membres actifs et qui est doté d'un chalet avec tables de billard et allées de quilles et qui est en bonne position sur les pistes de course et aussi membre de l'American Athletic Baseball Association.
Mais peut-être, Alcides Urban, préférez-vous cultiver le petit talent musculaire dont vous a doté la nature, vous qui n'avez pas grande affinité pour les sports. Eh bien, vous pouvez faire cela sans sortir des banlieues.
Vous ramez? Vous ne voulez ou ne pouvez pas payer 100 $ ou 120 $ pour un esquif que vous manieriez dans une égoïste solitude? Vous pouvez vous joindre, pour vingt-cinq dollars de frais d'admission et vingt dollars de cotisation annuelle, au New York Rowing Club, où plus d'une centaine d'autres jeunes hommes pensent exactement comme vous et apprécient la liberté que leur offre un bon hangar à bateaux juste au-delà de la passerelle ferroviaire de Harlem. C'est un club vétéran qui, de nos jours, éprouve un plus fort penchant pour le jeu que pour le travail; mais il fut un temps où son nom inspirait le respect parmi les coureurs, et les jeunes rameurs de notre temps estiment que certains des vieux « New Yorkais » sont les meilleurs « entraîneurs » qu'ils aient eus.
Si cela ne vous convient pas, peut-être préférerez-vous choisir entre le Nassau et l'Atalanta. Si vous êtes tenu de faire vos études à Columbia, vous pouvez vous joindre au club de canotage du collège. Si vous êtes un tout jeune courtier de Broad Street, vous voudrez peut-être prendre place sur les sièges à coulisse des esquifs du Stock Exchange Rowing Club. Ou peut-être encore préféreriez-vous être membre du Metropolitan ou du Dauntless; si vous habitez près de Bergen Point, de l'Argonaut; près de Yonkers, vous pourriez être membre des Palisades; à Staten Island, ce serait du S.I.R.C.
Peut-être l'envie vous a-t-elle pris de vous gonfler les biceps d'une autre façon. Les Écossais d'Amérique vous enseigneront l'art du lancer du poids et du marteau.
Vous avez peut-être lu « The Canoe and the Flying Proa » et souhaitez mettre à l'épreuve vous-même les vertus relatives de « Rob Roy », de « Shadow », du « Nautilus » et du « Herald ». Il existe le New York Canoe Club à Staten Island et le Knickerbocker Canoe Club sur Eighty-sixth Street et North River, et un autre club à Bayonne, « de l'autre côté au Jersey ». Il y a aussi le Flushing C. C. de Long Island, et vous aurez toutes les occasions possibles de vous faire à l'humidité soudaine qui vous envahit à la suite du chavirement de votre embarcation avant de partir en vacances, en faisant l'aller-retour jusqu'au Lake George.
Un canoë coûte, grosso modo, 100 $, et c'est un investissement sûr, sauf pour les imbéciles nés. C'est plus rapide qu'une chaloupe et moins susceptible, le siège étant placé sous la ligne de flottaison. Il donne envie de faire de l'exercice et de voyager sur les sentiers des eaux du plaisir et de la paix. L'American Canoe Association est assez enthousiaste pour soutenir une jolie revue mensuelle, publiée par la maison d'édition Brentano Brothers de New York, intitulée The American Canoeist. On y dit que la pratique du canoë pourrait enseigner l'art de réaliser ses objectifs.
M. J.R. Flannery est le bon génie de la crosse de sa région et il est bien secondé par MM. Erastus Wiman et Hermann Oelrichs; mais la crosse a connu à New York une carrière quelque peu spasmodique, ayant vécu, s'étant éteinte et ayant été ressuscitée à maintes reprises depuis une quinzaine d'années. Ce sport nécessite des terrains qui ne peuvent se trouver dans la ville. Pourtant, c'est un jeu intéressant - une espèce de hockey rudimentaire élevé au ne rang ou comme nous l'appelions, enfants, « gool »; je suppose que nous voulions dire goal, ou golf. En 1882, six clubs se disputaient la U.S.N.A.L.C. Association Cup, que remettait M. Oelrichs. C'étaient les clubs New York, Princeton, Harvard, Yale, New York University et Bloomfield, du New Jersey. Il ne reste plus maintenant que deux clubs dans la ville, le N.Y. et le N.Y.U.C., et celui de Brooklyn, l'Adelphic. La crosse est un sport hautement recommandé à l'athlète « libre ».
Le tennis pourrait bien convenir à votre fantaisie errante. C'est, il est vrai, un beau jeu, mais les raquettes font preuve d'un goût douteux. Quoi qu'il en soit, si vous pouvez vous offrir une chemise de flanelle, une paire de chaussures à semelles de caoutchouc et une raquette, si vous êtes en mesure de verser des frais d'inscription et des cotisations ridiculement faibles, il se pourrait bien que vous puissiez satisfaire votre fantaisie. Le tennis est le coucou des jeux. Il squatte constamment dans les nids étrangers. Il a son propre immeuble, rien qu'à lui, au 212 West Forty-first Street, où les pionnières du jeu, son effectif strictement composé de femmes aux bonnets rouges, jouent; il s'arroge pourtant aussi les manèges militaires et les salles de réunion; vous pourriez même le voir suspendu aux basques des clubs de tir à l'arc, de base-ball, de cricket et d'athlétisme en général dans les banlieues. Les nouveaux terrains du Manhattan Club sont censés avoir de merveilleux courts. Le St. George's Cricket Club, de New York, a vingt courts sur pelouse sur ses terrains à Hoboken, le Staten Island C. et le B.-B.C. en ont douze, et il y en a aussi à Prospect Park, à Brooklyn. Il existe neuf clubs de tennis solidement établis au New Jersey (dont certains adjacents à des clubs de base-ball, de cricket ou de tir à l'arc), deux à Brooklyn, un à Staten Island et un à Hastings - plus précisément Hastings-upon-Hudson, qui est si britannique. Les vieux clubs s'éteignent et de nouveaux naissent constamment, mais on pourrait sans grand risque de se tromper estimer à mille cinq cents le nombre de membres de clubs à New York et dans ses banlieues. Les joueurs de tennis champions sont M. R.D. Sears et M. James Dwight, tous deux de Bolton.
Au nombre de ces tenants de la raquette légère je n'ai pas compté les membres du Racquet Club - une grande organisation logée dans un château sombre au coin de Twenty-sixth Street et de Sixth Avenue; un palais des célibataires s'y trouve, bien connu des jeunes et riches New Yorkais nageant dans le luxe.
Si vous aimez la bicyclette, Alcides; si vous ne craignez pas l'ostracisme de la société parce que vous enfilez votre culotte courte soignée et que vous vous coiffez d'une casquette de polo et que vous enfourchez cette raide monture qu'aucun « citoyen moyen » n'oserait monter, par crainte de dérision et de ridicule; si vous souhaitez jouir d'une promenade qui vous permettra de connaître la joie combinée de la force et de la vitesse du cheval avec son cavalier; si vous voulez filer le long des belles routes du New Jersey, ou sur le boulevard lisse jusqu'aux Yonkers, ou le long de Pelham Road, en passant à toute vitesse à côté du très britannique Coaching Club; si vous voulez avoir de longues jambes, une bonne digestion et de bonnes nuits de sommeil - vous pouvez vous joindre au groupe d'hommes à bicyclette, à qui est interdite la traversée des dédales de Central Park parce que des chevaux ont affiché à l'occasion une certaine antipathie pour les knickerbockers et les pneus de caoutchouc. Les chevaux, c'est bien connu, n'ont jamais craint les locomotives, les tas de briques, les affiches de cirque, les orchestres ni les parasols rouges.
Il y a place, dans le monde, pour les bicyclettes en dehors de Central Park, Alcides, et vous pouvez apprendre à les monter avec bien plus de facilité et de quiétude que les malheureux pionniers de ce sport, il y a trois ans, lorsque le vélo était nouvellement arrivé sur les chemins de New York et que les chiens les poursuivaient sous les railleries de la population. À l'époque, vous deviez apprendre seul, mais de nos jours vous pouvez vous adresser à l'école de M. Elliot Mason, sur Thirty-fourth Street, où l'un des Mason, plus attentif à vos progrès qu'un frère, vous tiendra sur votre engin jusqu'à ce que vous l'ayez maîtrisé. Puis vous pourrez y louer une bicyclette, ou encore sur Fifty-ninth Street et Fifth Avenue, et vous pourrez vous pratiquer sur la route jusqu'à ce que vous estimiez pouvoir investir quatre-vingt-dix ou cent dollars dans un « Special Columbia » ou, avec vingt ou cinquante dollars de plus, dans une « Humber » d'importation ou une « Expert » bien d'ici. Les machines britanniques ont tenu le sommet du marché jusqu'à récemment, mais on commence bien à voir que les bicyclettes américaines sont plus durables et mieux adaptées à nos rudes chemins. Une fois propriétaire d'une bicyclette, vous pouvez vous inscrire à l'un des clubs de New York, le Manhattan, le Mercury, l'Ixion, le Citizen's ou le Lenox club; ou encore, si vous habitez Brooklyn, vous avez le choix entre le Brooklyn Bicycle Club ou le King's County Wheelmen de Williamsburg.
Faites-vous de la navigation de plaisance, comme on dit de nos jours? Alors les clubs nautiques de la région sont le Brooklyn, le New York, le Seawanhaka et le Larchmont.
Image digitalisée de la page 406: Le sport chez les citadins (suite) [traduction]
Vous prenez plaisir à jouer au cricket et il vous manque d'entendre les touristes britanniques, accoudés au portail du club, s'exclamer : « Well played sir! »? Alors, il vous suffit de prendre la batte sous la bannière du St. George d'Hoboken, des Staten-Islanders ou encore des Manhattans de Brooklyn. Vous aurez l'occasion de rencontrer les Young Americans de Philadelphie ou les Thespians de partout.
Alcides Urban, mon garçon, ne craignez rien de votre tante Cassandra, la vieille fille. Quand bien même ses prédictions s'avéreraient réelles et que vous auriez quelques doigts foulés, une ecchymose ou deux, ou encore le menton écorché?
« Qui studet optatam cursu contingere
metam,
Multa tulit fecitque puer, sudavit et alsit. »
Ces mots sont aussi vrais aujourd'hui que lorsqu'ils ont été écrits. Si vous atteignez le but visé - d'avoir une bonne santé, un esprit autonome, des forces bien disciplinées - cela aura valu toutes les peines et toutes les souffrances, toute la sueur et tous les frissons.
Et n'oubliez surtout pas qu'il y a peu d'endroits où vous pouvez atteindre plus sûrement ou plus rapidement votre objectif que dans notre bonne vieille ville de New York. J'ai essayé de dépeindre pour vous ce qu'elle est. Ce qu'elle sera, je n'en ai qu'une vision. Je vois « au travers des tourbillons du vent et des vagues de la baie » les blanches voiles des yachts qui ont bravé le vaste océan pour venir saluer les embarcations britanniques de l'Île de Wight. Je vois les longues coques monter et descendre ses rivières, les roues argentées briller sur les routes. Je vois une génération de jeunes athlètes qui nagent, courent, font du vélo ou de la boxe et qui se mesurent aux plus durs et aux plus musclés du monde; sur leur poitrine luit la médaille sans valeur mais pourtant combien glorieuse; leurs étagères sont chargées de coupes avec lesquelles ils ne boivent que la bière de l'ambition qui, en stimulant leur force, leur adresse et leur détermination, les aidera à faire de New York la capitale sportive du monde.
Image digitalisée de la page 406 : Entraînement de la mémoire [traduction]
Dans une entrevue publiée récemment, le Dr Zukertort, célèbre joueur d'échecs, donne un aperçu de la méthode d'entraînement mental à l'aide de laquelle il a acquis le pouvoir de jouer seize jeux d'échecs simultanément sans voir l'échiquier. Il déclare : « J'ai un moyen de photographier l'échiquier dans mon esprit et, les échiquiers étant numérotés, dès qu'on fait référence à un échiquier, l'image des positions qu'occupent les pièces sur cet échiquier me vient instantanément à l'esprit tandis que le dernier échiquier disparaît. Je ne vois jamais deux échiquiers devant moi au même moment. » D'autres joueurs d'échecs ont merveilleusement perfectionné ce pouvoir d'abstraction et de mémoire, et peut-être personne d'entre eux n'a été à la hauteur du Dr Zukertort, ce qui nous porte à croire que la faculté en tant que telle n'est pas rare. C'est la même faculté qui permet au commandant militaire accompli de garder en tête la position des troupes et l'importance relative des mouvements, ou au dirigeant des systèmes ferroviaires des grandes entreprises commerciales de voir clairement lorsque surviennent des complications d'affaires, afin de maintenir l'ordre et la méthode pour toute la durée de la ligne de front contre l'adversaire. Peu de gens ont développé ce pouvoir jusqu'aux limites de leurs capacités, mais peu de gens d'intelligence moyenne sont dépourvus de ce pouvoir à un degré élevé. Le Dr Zukertort dit qu'il a reçu une formation particulière. Il n'a appris à jouer aux échecs qu'à l'âge de dix-huit ans. Son parrain, qui était professeur de mathématiques, avait des théories sur l'entraînement de la mémoire. Grâce à son enseignement, le futur champion d'échecs, encore un enfant, pouvait faire la démonstration d'un problème de géométrie tel que le carré de l'hypoténuse entièrement de mémoire, c'est-à-dire qu'il construisait la figure géométrique sur papier, ou sur le tableau, plaçant les lettres à des angles divers, et ensuite, le dos tourné au tableau, il faisait la démonstration correctement. Pour plusieurs personnes qui ont réfléchi au même théorème avec la figure devant elles, cela semblera un bien grand exploit, bien qu'il y ait peu d'écoliers qui puissent même faire la démonstration du théorème et qui trouvent difficile d'apprendre à le faire mentalement. Dans les écoles publiques de certaines régions du pays, où les mathématiques mentales sont une sorte de passe-temps, il est d'usage de parcourir mentalement quatre livres de géométrie; et dans une classe de vingt élèves, généralement pas plus de deux ou trois n'arriveront à garder le rythme. Certains auront plus de difficultés que d'autres, mais on a trouvé que l'exercice devenait une sorte de passe-temps pour la majorité. Ils s'intéressent à savoir ce dont ils sont capables. Ils commencent avec les figures les plus simples, nécessitant la mémorisation de quelques positions, et en s'exerçant tous les jours ils peuvent facilement aborder les démonstrations plus complexes. Pour montrer une fois pour toutes que la démonstration n'est pas simplement un processus d'apprentissage par cœur d'un livre, l'élève peut changer les lettres sur la figure ou permettre à quelqu'un d'autre de placer les lettres. Quand les élèves sont instruits intelligemment, très peu sont incapables de maîtriser cet exercice, et les filles le font aussi facilement que les garçons. Bien entendu, le pouvoir de garder en mémoire les coups d'un jeu d'échecs consiste à pousser cette même faculté à un niveau d'excellence plus élevé. Dans un cas, les positions à garder en tête restent fixes, tandis que dans l'autre elles changent constamment, mais c'est la même faculté dans les deux cas. C'est une faculté que presque tout le monde peut acquérir dans une très grande mesure.
Image digitalisée de la page 406 : Clins d'oeil d'une tête tranchée [traduction]
Selon le journal Figaro de Paris, le docteur de la Pommerais a été exécuté en juin 1864 pour un assassinat à la Palmer. La veille de son exécution, le chirurgien Vealpeau lui a rendu visite et, après quelques remarques préliminaires, lui a dit qu'il venait dans l'intérêt de la science et qu'il espérait que le docteur de la Pommerais se montrerait coopératif. « Vous savez », dit-il, « qu'une des questions les plus intéressantes de la physiologie est de savoir si une certaine lueur de mémoire, de réflexion ou de sensibilité survit dans le cerveau d'un être humain après la chute de la tête. » En cet instant, le condamné a eu l'air surpris, mais c'est l'instinct professionnel qui l'a emporté, et les deux médecins ont discuté calmement et mis au point les détails d'une expérience prévue pour le lendemain matin. « Au moment où la guillotine sera actionnée », dit Vealpeau, « je me tiendrai à vos côtés et immédiatement après le bourreau me remettra votre tête dans les mains. Je crierai alors clairement dans votre oreille : "Couty de la Pommerais, pouvez-vous en ce moment fermer la paupière de votre œil droit trois fois, tout en laissant celle de l'œil gauche ouverte?" » Le jour suivant, lorsque le grand chirurgien est arrivé à la cellule du condamné, ce dernier était en train de s'exercer à faire le signe convenu. Quelques minutes plus tard, il a été guillotiné, la tête du condamné se trouvait dans les mains de Valpeau et celui-ci posait la question. Bien que Velpeau ait été familier avec les scènes les plus choquantes et affreuses, il a été saisi de terreur quand il a vu que la paupière de droite était fermée et que l'œil gauche le regardait fixement. « Encore! » a-t-il crié désespérément. Les paupières ont bougé, mais elles ne se sont pas séparées. Tout était fini.
Image digitalisée de la page 406 : Écrasé d'amour au musée [traduction]
La femelle de l'orang-outan, qui se conduit comme une dame et dont les sourires fascinants ont attiré beaucoup de monde ces derniers temps au Dime Museum, a succombé aux séductions de Cupidon et elle est devenue la fidèle bien-aimée d'un petit mais vif spécimen de la race canine, connu sous le nom de « Nig » par les attachés du musée. Les propensions écrasantes de Nig se portent vers plusieurs guenons jeunes et innocentes dans le département de zoologie du musée ainsi que vers le chat du bureau. On a mis à l'essai les charmes de Nig en le présentant à l'arrogante et aristocratique Mme Orang-Outan, veuve de feu M. Orang-Outan, des jungles javanaises. Par conséquent, un après-midi, alors que la belle dame mangeait un régime de bananes au dîner, on a lâché Nig dans sa cage et il a immédiatement manifesté une de ses attitudes les plus séduisantes en remuant la queue d'un air rusé et il a aboyé en guise de compliment de sa voix la plus douce et la plus séductrice. Au début, Mme Orang-Outan était apparemment surprise, puis elle a paru ennuyée de la présomption du chiot qui osait courtiser quelqu'un de très supérieur à lui, comme elle se considère de toute évidence. Aucunement déconcerté, toutefois, il a aboyé doucement encore une fois et de nouveau il a agité sa petite queue coquette une fois ou deux. L'effet a été évidemment en sa faveur, et cinq minutes après il avait complètement charmé cette douce étrangère originaire des forêts tropicales. Depuis ce temps-là, le couple est devenu inséparable, et Mme Orang-Outan non seulement partage ses repas avec son soupirant fidèle, mais elle refuse de permettre à qui que ce soit de le retirer de sa cage. Voyant la nature affectueuse de la guenon, les directeurs du musée ont tenté de faire une expérience en offrant une petite amie à son fils, maître Orang-Outan, qui est toujours plein d'entrain et qui occupe une cage séparée de sa mère. On a choisi une gentille petite chatte pour être sa copine. Au lieu de roucouler des mots tendres à l'oreille de Mlle Tabby, maître O. s'est mis à l'utiliser pour marteler les murs de sa cage comme si elle était une massue de bois. Pour sauver ses neuf vies, elle a dû être secourue de sa prise inhospitalière.
Image digitalisée de la page 406 : George Francis Train
Barnum a offert cinquante mille dollars à George Francis Train pour donner des conférences pendant une année aux États-Unis et en Grande-Bretagne. Train a cependant décliné l'offre. L'esprit de Train est probablement un peu dérangé maintenant, mais il avait l'habitude de s'adresser au public d'une manière intéressante, et ses conférences sur scène ont fait sensation à un moment donné et ont remporté un grand succès financier. Nous croyons que Train a depuis longtemps pris la décision de ne plus parler à un adulte. Quand il fait beau, il passe son temps au Madison Park à jouer avec les enfants d'une manière affectueuse et tout innocente. Tous les jours il apporte des bonbons, des cordes à sauter et des jouets avec lui au parc, et il amuse les enfants à leur souhait ainsi qu'au sien. Train vit à Ashland House, sur la Fourth Avenue, et il passe la plupart de son temps à lire des journaux et à gribouiller. Il s'assoit devant la fenêtre qui se trouve dans le coin à l'extrême sud en tournant le dos à la rue, et le revers gauche de son manteau porte toujours un bouquet énorme de magnifiques fleurs fraîches. Ses cheveux sont gris acier; il a le teint brun en raison de son exposition au soleil. Il a un physique superbe et il est éclatant de santé. Train ne prête pas la moindre attention aux passants et il a l'air très satisfait de lui-même. Nous sommes d'avis qu'il possède de grands moyens.
Image digitalisée de la page 406 : Victor Hugo
Victor Hugo se porte très bien, mais il souffre d'ennui. Il n'aime pas montrer ni admettre sa surdité. Les réceptions durent maintenant vingt minutes et ont toujours lieu après le dîner. Bien que les étrangers soient accueillis avec courtoisie, ces visiteurs ne sont pas les bienvenus. Il doit leur parler et ainsi trahir la seule infirmité dont souffre le poète. Ce qui le réjouit le plus, c'est de voir ses amis au dîner. Présidant sa table, il peut se parler à lui-même ou parler aux autres autour de lui. Il se retire dans sa chambre à neuf heures et fait les cent pas jusqu'à minuit, songeant à ce qu'il va écrire le lendemain matin. Dans l'après-midi, une princesse russe, qui est elle-même poète et l'une des plus enthousiastes admirateurs de Hugo, l'emmène au Bois pour faire une promenade. Elle est arrivée aux Steppes dans les circonstances les plus étranges; elle est la fille d'un des sujets les plus riches du Tsar. Pour l'usage exclusif du chantre vénérable, elle a un coupé légèrement suspendu tiré par une paire de chevaux Orloff. Après la mort de Hugo, les chevaux seront gardés dans une écurie et des enclos séparés de tous les autres animaux de leur race, et la voiture trouvera place dans un musée privé. Bien que la princesse soit élevée comme Baby Blake, elle est la femme la plus accomplie que l'on connaisse. Elle est mariée, et comme elle veut que ses filles gardent précieusement les paroles de son ami illustre, elles occupent presque toujours le siège avant du coupé lors des promenades de la princesse.
Image digitalisée de la page 406 : Génèraux complices [traduction]
L'Advertiser de Boston informe le monde au sujet des chefs de file de la dernière rébellion du Sud. Parmi ceux qui ont échappé à la mort soit par l'épée ou le canon et qui ont été livrés par la suite à la grande mort, on trouve Lee, Bragg, Pickett, Hardee et Taylor. Les survivants sont dispersés à travers le pays et occupent divers postes. Beauregard et Jubal Early sont directeurs d'une loterie en Louisiane. Les noms de ces généraux sont d'une grande valeur pour la compagnie de loterie et chacun d'entre eux coûte 10 000 $ annuellement à la compagnie. Longstreet est maréchal des États-Unis en Géorgie. McLaws est receveur des postes à Savannah. Ils sont tous les deux républicains en ce qui concerne la politique. Butler et Hampton représentent la Caroline du Sud au Sénat, les majors-généraux Cockrell, Maxey et Ransom font partie du Sénat. Cadmus Williams, qui était major-général dans le second corps d'armée de Lee, est portier au Sénat. William H. Lee a succédé à son père en tant que recteur de la Washington and Lee University. Fitzhugh Lee est un fermier riche et à l'aise; il est propriétaire de l'un des meilleurs domaines en Virginie. Buckner est au Kentucky et il a failli être nommé gouverneur aux dépens de Proctor Knott. Johnston a vieilli maintenant, mais il est actif dans le secteur de l'assurance.
Image digitalisée de la page 406 : Dandys de Boston [traduction]
M. Fitz-Augustus Somerset-Ashburton, le champion exquis de Boston, a manqué ses rendez-vous d'usage pendant plusieurs mois, mais il s'est récemment présenté, un après-midi, à son poste habituel à l'entrée d'un de nos théâtres principaux. Il y a rencontré l'un des membres de l'association de la guilde qu'il pare, qui l'a salué avec enthousiasme et a vigoureusement agité les deux doigts languissants que M. Somerset-Ashburton lui a tendus.
« Bon sang, Fitz, mon grand », s'est écrié son ami; « je suis ravi de te voir de nouveau. Tout est prêt pour la campagne de l'hiver, hein? Où étais-tu passé pendant tout l'été? »
« Ouais! je suis content que tu sois ravi », a répondu le noble Somerset- Ashburton. « J'étais à l'étranger cet été, en train d'étudier, et de plus, j'étais sacrément studieux, je t'assure. »
« Étudier! » s'est exclamé son ami, qui n'a jamais entendu dire qu'une personne de sa coterie éminente se soit occupée d'une telle manière. « Et dis-moi donc ce que tu étais en train d'étudier! »
« L'art, mon cher ami », a répliqué M. Somerset-Ashburton. « J'ai visité tous les célèbres musées d'art de l'Europe, en prenant des notes particulièrement dans le domaine de la sculpture. J'améliore mes attitudes, tu ne sais pas? J'ai ressenti pendant longtemps que les gars n'accordaient pas suffisamment d'attention à ces choses-là. Cela fait du bien d'étudier les vieilles choses, mon ami. »
En bâillant profondément et d'une telle manière que cela a tout de suite suggéré la pose de Laocoon, il s'est appuyé contre le mur avec une attitude de faune gazouillant et a commencé à regarder les femmes comme elles entraient dans la salle.
Image digitalisée de la page 406 : Notes en bas de page [traduction]
LES PARISIENS tiennent toujours à ce que le prince de Galles leur rende une visite bientôt. Beaucoup de gens attendent avec impatience la visite de Son Altesse Royale à Paris, considérée comme un événement mondain plaisant. Il est fort possible qu'ils doivent attendre jusqu'au printemps et le retour de voyage de son Altesse royale dans le Sud.
LA PLUS JEUNE FILLE de Boucicault, Mlle Nina, a fait son entrée sur scène récemment en jouant le rôle de Moya dans la pièce « The Shaughraun », à Louisville, au Kentucky. Mlle Nina n'a que seize ans; on dit que son visage et son physique la font ressembler beaucoup à sa mère. Son jeu est si naturel et innocent qu'elle mérite des applaudissements chaleureux. Elle est très belle et promet de remporter du succès.
LA nouvelle église de l'oratoire de South Kensington, à Londres, et qui promet d'être l'une des plus belles églises en son genre en Angleterre, est près d'être achevée. Le confessionnal est arrivé de Belgique. Il est en chêne finement ciselé; une tête de pélican surmonte le centre et deux anges grandeur nature sont placés de chaque côté, l'un portant des clés et l'autre effaçant les péchés des pénitents, tandis que sur le panneau de la porte se trouvent des sculptures de la Passion.
SAINT-MARIN, qui a le plus vieux gouvernement de l'Europe et qui est aussi la plus vieille et la plus petite république du monde, est sur le point de répondre au secrétaire d'État des Affaires étrangères afin d'établir des relations diplomatiques avec la Grande-Bretagne. Il n'y a ni intérêt personnel ni intérêt pécuniaire engagé dans les deux camps, et de telles relations ne devraient se révéler que fructueuses dans l'avenir. Situé au beau milieu de l'État pontifical, ce petit territoire d'une circonférence de trente milles est reconnu comme un État indépendant depuis le treizième siècle, à l'époque où l'on refusait de payer certains impôts infligés par le pape. Jusqu'au quatorzième siècle, c'est la communauté tout entière qui assurait la souveraineté.
Image digitalisée de la page 406 : Rentrer à la maison [traduction]
Le soleil décline rapidement derrière les sommets des collines,
Perçant les nuages d'un éclat mauve,
Les feuilles splendidement dorées et cramoisies
Vannant à l'endroit où les nœuds rugueux se penchent.
Le moissonneur au beau milieu des champs de blé désertés
Récoltant les grains mûris et se réjouissant;
Maintenant, le travail est achevé, et d'un pas lent
Il se met en route derrière le chariot chargé.
L'air doux fraîchit et le crépuscule tombe,
Au loin les fenêtres des maisons s'illuminent,
Sifflant joyeusement, le moissonneur fait avancer,
Avec patience et lenteur, ses bovins à la démarche pénible.
Les gerbes empilées s'assombrissent dans l'obscurité,
Les étoiles paraissent dans le firmament voilé,
Le chariot pesant, sous la plainte de ses roues,
S'avance lourdement jusqu'à la porte de l'étable.
Au coin du feu, dans la lueur rougeâtre,
Faisant de la main un signe d'accueil et poussant une joyeuse acclamation;
Rassemblés autour du feu, des gens au visage familier
Dans l'attente de sourires à l'approche d'un pas;
Craquement d'énormes bûches, le feu s'intensifie,
La maison se réjouit de fond en comble.
Alors que, dans le froid, sous le souffle piquant du crépuscule
Le moissonneur rentre chez lui avec ses gerbes lourdes.
Doucement autour de moi les ombres s'étendent et prennent vie,
Mon soleil disparaît rapidement dans le ciel terne,
Un par un à la tombée de la nuit,
Les jours de mes années passent comme un fantôme;
Les champs, tout de blanc lors de la récolte, sont dépouillés,
Les feuilles mortes tombent autour de moi;
Moi aussi, je rentre à la maison tout comme les moissonneurs fatigués,
Me réjouissant à la pensée de m'allonger sur mes gerbes entassées. (trad.)
Alice Cora Hammond.
Image digitalisée de la page 406 : Divers [traduction]
ON fait de merveilleux comptes rendus sur l'aptitude linguistique et les succès du prince héritier du Portugal, qui vient de célébrer son vingtième anniversaire il y a quelques semaines. Il possède déjà une bibliothèque privée contenant quelque quarante mille volumes, y compris des éditions rares et précieuses d'œuvres d'auteurs célèbres du monde entier. Il promet de maîtriser toutes les langues européennes, car, en plus de devenir le Mezzofanti de son époque, il parle couramment l'anglais après seulement deux années d'études, mais il parle au moins quatorze langues et il maîtrise ainsi à peu près toutes les langues d'Europe.
SI le Jersey Lily a assommé Freddie, les Américains, par contre, ont pris leur revanche. Un Anglais jeune et riche - un séducteur, un poète et un athlète - a le béguin pour Mary Anderson. Chaque soir, il se met dans la peau d'un chantre et, apercevant la divine Kentuckienne passer la porte du théâtre en direction de sa voiture, il se met à genoux et joue sur sa petite flûte un air mélancolique qui ressemble à une vache étranglée par un épi dans la gorge. Il est obligé de vouer silencieusement un culte à la beauté qui a charmé son âme, car elle a refusé de le recevoir ou d'accepter un bouquet de valeur venant de lui. Mary n'est pas aussi gentille que Lily.
LES portes de l'église historique sur lesquelles Luther a gravé ses quatre-vingt-quinze thèses à Wittenberg en 1517 se trouvent maintenant à l'entrée principale de l'église Saint-Barthélemy, à Berlin. On a bombardé Wittenberg pendant la guerre de Sept Ans, et l'église a été presque rasée et les portes, sérieusement endommagées. Cependant, on les a réparées, restaurées et remises à leur place lorsqu'on a reconstruit l'église; mais comme elles ont beaucoup souffert des éléments, et on les a enlevées à temps pour les mettre en lieu sûr au musée de Berlin, où elles sont restées jusqu'à ce que le roi Frederick William V. les ait remises à l'église Saint-Barthélemy lors de son achèvement. En Allemagne, les portes originales sont connues sous le nom de « portes de la Réforme », et elles ont été remplacées à Wittenberg par de nouvelles portes de bronze sur lesquelles on a gravé les thèses de Luther. En 1858, le roi Frederick William V a offert les portes originales à l'église palatine, et elles sont les meilleures en leur genre qu'on puisse avoir en Europe.
NE PRÊTEZ PAS VOTRE CIGARE. - Selon le Dispatch de Pittsburg, un homme de lettres était en train de fumer et de parler à un médecin sur un navire transbordeur de la rivière d'Hudson quand un étranger s'est arrêté et a demandé du feu. « Permettez-moi de vous donner une allumette », a répondu l'homme de lettres, ajoutant après le départ du demandeur : « Je ne sais pas ce que vous en pensez, docteur, mais, pour ce qui est de moi, je déteste remettre le bout de mon cigare dans la bouche après que tout le monde l'eut touché. J'ai des allumettes sur moi tout le temps et je ne manque jamais d'en offrir une. » « Vous avez raison », a répondu le docteur. « Je crois qu'on peut transmettre les pires maladies d'un homme à un autre avec ses doigts par l'intermédiaire d'un cigare emprunté. Je connais un cas où la variole a été transmise par l'intermédiaire d'un billet de deux dollars, et j'ai la ferme conviction que la variole et d'autres maladies plus graves peuvent être transmises des doigts d'un homme à un cigare et, par conséquent, au fumeur du cigare. »
Image digitalisée de la page 407 : À l'aube du Nouvel An [traduction]
Les allées du Temps
Sont pleines de portes - les portails des années passées;
Nous ne les franchissons plus, en dépit des années remplies d'amertume
Nous nous battons contre elles, et l'on entend le carillon
Des rêves perdus, comme des chants funèbres, sonner derrière elles,
À l'ouverture de la mémoire.
Mais une porte reste entrouverte -
Celle du Nouvel An; tandis qu'une chaîne dorée des jours
La tient à moitié fermée. Le pied pressé s'attarde
Appuyant sur la barre puissante du seuil;
Et les peurs qui diminuent, et les espoirs qui hurlent
Autour d'elle attendent et s'assemblent.
Elle renferme l'inconnu,
Et osons-nous vraiment accueillir une autre année,
Qui abat le passé, se moquant ici
Des buts inutiles comme un coup de vent éphémère?
Nos grandes aspirations ternies et anéanties
Jusqu'au jour où le manuscrit de l'année était blanc?
Nous nous arrêtons à côté de la porte,
Votre année, Ô Seigneur, comment allons-nous entrer?
Comment ferons-nous donc pour récolter vos trésors cachés?
Faudra-t-il faire de nous des mendiants, comme avant,
Quand tu seras à proximité, avec des richesses illimitées,
Sagesse et richesse céleste?
Les pas d'un Enfant
Son qui nous est familier! Écoutez! Il parlera,
Les cloches de son anniversaire ont à peine sonné pendant une semaine.
Pourtant Il traîne la foule du monde sans tache,
« Viens à moi! » écoutons-Le à travers Ses paroles réjouissantes,
« Tenez, Je suis la voie! »
Contre la porte Son visage
Brille comme le soleil. Son toucher est un ordre;
Les années se déroulent devant Sa main d'enfant!
La beauté de sa présence emplit tout l'espace.
« Entre en Moi », dit-Il, « cesse d'errer,
Voilà! Je suis la Porte. »
Et toutes les portes s'ouvrent à Lui,
Le Christ nouveau-né, le Seigneur du Nouvel An,
Le seuil de nos cœurs fermés n'est pas loin;
Et alors qu'Il nous donne la clé rouillée de l'amour,
Notre avenir nous a souri dans Ses yeux,
Comme un petit enfant. (trad.)
Image digitalisée de la page 407 : Les mesures des domestiques [traduction]
Bon nombre d'aliments, surtout les gâteaux et autres préparations nécessitant une « recette », sont de qualité inférieure à cause de l'imprécision des mesures. « Une pincée » de sel, de poivre ou de tout autre assaisonnement peut équivaloir à quatre fois plus d'une personne à l'autre - suffisamment pour changer complètement la qualité et le goût. Les cuillères à café, les tasses à thé et à café varient beaucoup maintenant. L'ancienne tasse à thé standard contenait seulement une demi-chopine, soit quatre tasses pour faire une pinte, et la tasse à café contenait trois quarts de chopine ou deux tasses et deux tiers pour une pinte; mais l'essai de plusieurs tasses maintenant utilisées a révélé qu'il faut trois tasses à thé pour remplir une pinte; une autre en prendra cinq, une autre, six, tandis qu'il faut deux tasses à café pour remplir une pinte dans certains cas et presque quatre dans d'autres. Pour faciliter les choses, et pour une grande commodité, la ménagère devrait tout simplement avoir à portée de la main des tasses graduées en faïence ou en fer blanc. Trouvez une tasse à thé ou un gobelet pouvant contenir exactement une demi-chopine et gardez cette tasse ou ce gobelet. Ou encore utilisez une petite tasse en fer blanc - de préférence une tasse munie d'une anse. La cuillère à mesurer est beaucoup plus importante, surtout pour administrer les médicaments. La cuillère est si évasée qu'il est difficile de savoir, lorsqu'elle est rase, si cela correspond à une « dose d'une cuillérée à thé » de n'importe quel médicament ou d'un extrait aromatisant pour la cuisson; en fait, la dose peut être deux fois celle qui est prescrite. La cuillère à thé standard rase contient un huitième d'une once liquide, ou 128 pour faire une chopine, et la cuillère standard en contient trois fois plus, ou 42 pour faire une chopine. Soixante gouttes d'eau égalent une cuillerée à thé, mais la grosseur de la goutte de différents liquides varie. Chaque famille doit avoir un « compte-gouttes ». Ce dernier consiste en un petit tube ou une petite tasse ayant une base élargie et un bec verseur. Il est gradué sur le côté et les chiffres 10, 20, 30, 40, 50, 60 indiquent le nombre de gouttes; 60 équivaut à une cuillerée à thé standard. En ayant cet outil à portée de la main, on peut toujours mesurer exactement des cuillerées à thé de n'importe quoi. Lorsqu'il s'agit de l'administration d'un médicament, une telle exactitude quant à la dose peut signifier la guérison. On peut acheter ces compte-gouttes chez la plupart des pharmaciens au coût de quinze à trente cents chacun.
Image digitalisée de la page 407 : Les chats [traduction]
Le mystère entourant le caractère du chat est probablement la cause d'une antipathie commune, mais cela est attribuable à l'ignorance. Le chat n'est pas obligé de s'expliquer afin d'éviter les préjugés. Il est au-dessus de cela. Beaucoup de gens bienveillants, qui craignent la multiplication des chats domestiques, noient leurs chatons. Ainsi, plusieurs limitent la reproduction à cause d'un manque de confiance en la Providence. Certaines familles distinguées mettent les chatons dans un sac et les distribuent pendant leurs promenades. S'ils laissaient la mère des chatons seule, elle subviendrait à leurs besoins sans une telle cruauté. Une chatte ayant beaucoup de petits ne laisse pas à la famille le soin de s'occuper de ses petits. En temps opportun, elle distribuera ses chatons parmi les voisins, faisant preuve d'un grand discernement dans le choix des lieux, et ils démontrent une grande intelligence en restant à l'endroit choisi.
Dans notre société, une mère ne se préoccupe pas plus de trouver des maris à ses neuf filles qu'une chatte ne le fait pour chercher des foyers pour ses neuf chatons. Elle retournera pour jouer avec chaque chaton, et ensuite elle partira sans le moindre geste de la part du petit indiquant qu'il veut la suivre. La part de mystère et de surnaturel entourant le chat est très intéressante, et les qualités domestiques évidentes de cet animal sont admirables. Sa modestie parmi les animaux est remarquable. Sa dignité, son sang-froid et son courage sont merveilleux. Le chat se reposera sur le trottoir où, à n'importe quel moment, son ennemi, le chien, peut arriver et perturber la sérénité de cette confiance en sa capacité de prendre soin de lui-même. Même les chatons agissent ainsi.
On suppose que le chien et le chat sont des ennemis naturels. Le chat est trop fort d'esprit pour être l'ennemi naturel de n'importe quelle créature. Il chasse pour se nourrir et, ce faisant, il partage la noblesse de l'homme; mais il apprécie la nourriture qu'il obtient sans ces ennuis. Le chiot et le chaton qui ont grandi ensemble mangeront dans la même écuelle et feront une très belle fête de famille. En songeant à leurs habitudes prolifiques, loin d'être réprimées par les usages, la question se pose d'elle-même à savoir comment il se fait qu'il n'y ait pas surpeuplement chez les chats. À en juger par leur caractère, on peut présumer qu'ils se rendent à des endroits réservés aux chats, où tout est bien pour eux.
Image digitalisée de la page 407 : Le même ensemble [traduction]
L'histoire orale du récent voyage de Lord Coleridge dans ce pays [aux États-Unis] serait probablement plus intéressante, et de loin, que les chroniques quotidiennes publiées dans la presse. Voici ce que les habitants d'une ville florissante située à l'ouest de New York ont confié en retenant leur souffle. Un magnat de la région avait invité le juge en chef à dîner un soir. Un traiteur bien connu de cet État avait fourni les rafraîchissements et la vaisselle de porcelaine utilisée pour le service, laquelle était un nouveau service de vaisselle de toute beauté, peint à la main. On raconte que pendant le dîner Lord Coleridge a dit à sa charmante hôtesse : « Pardonnez-moi, mais je ne peux m'empêcher de vous complimenter quant à l'exquise beauté de votre vaisselle. » L'hôtesse a reçu calmement le compliment et a répondu avec grâce : « Merci, Votre Seigneurie. Nous l'étrennons en votre honneur. » Puis le dîner s'est poursuivi sur une note de réussite. Imaginez la surprise de Sa Seigneurie, lorsque le petit déjeuner offert le lendemain matin par une sommité du tribunal fut servi dans la même vaisselle. Mais il fut encore plus surpris quand, le jour suivant, lors d'un banquet offert en son honneur dans une ville rivale, située à quatre-vingt-dix milles de là, il eut droit à la vaisselle peinte à la main que l'on avait étrennée en l'honneur de Sa Seigneurie.
Image digitalisée de la page 407 : Échos de Paris [traduction]
PARIS, le 1er décembre
LA princesse Dolgorouki a fait l'acquisition de l'une des plus belles villas de Nice, entourée de beaux jardins, et elle s'y établira cet hiver.
UNE PERSONNALITÉ CÉLÈBRE du monde du sport et de l'aristocratie a fait une telle impression sur une belle dame, qui vient de décéder, que celle-ci lui a légué tout son argent, ses bijoux et sa dépouille. C'est ce que l'on appelle un embarras des richesses.
LE prince héritier et la princesse du Danemark sont attendus à Paris pour un bref séjour lorsqu'ils quitteront leur château de Widd; ils partiront ensuite pour Sandringham.
ENCORE de grands Russes à Paris! Le prince Sergus, frère de l'empereur, vient d'arriver. Tous les dignitaires russes fréquentent le Continental; et, à tous égards, c'est sans contredit un hôtel splendide - abordable - qui offre tout le confort et le luxe.
LA rumeur court dans un club de Paris où les gens sont bien informés sur la vie des célébrités que le prince de Galles viendra à Paris sous peu; mais cette visite ne semble guère possible si les dates de la visite de Son Altesse Royale que l'on nous a données sont exactes.
LES Parisiens assistent avec étonnement aux préparatifs en vue du départ du marquis Tseng de Paris avec tous ses effets personnels. Il semble que cela mettra finalement les choses en perspective et ils se rendront compte de l'ordre des choses. On croyait que c'était simplement un jeu diplomatique. « Et ils vont vraiment se battre contre la France », disent beaucoup de gens, feignant l'étonnement.
LE célèbre musée situé à Saint-Germain-en-Laye, curiosité principale de cette ville florissante située tout près de Paris, sera orné l'année prochaine d'un grand tableau décoratif représentant l'âge de fer, tableau qui sera exposé au Salon de l'année prochaine. L'auteur de cette œuvre magnifique est M. Cormon, dont les peintures précédentes sur ce thème lui ont déjà permis de se faire une réputation.
ON vient d'apprendre le décès, en Suisse, d'une jeune femme membre distingué du cercle aristocratique de Paris - madame de Boislaurent. En cueillant ses fleurs favorites, les edelweiss, elle a surestimé ses forces et est tombée d'un immense sommet; elle est morte quelques heures après sa chute. On a placé des guirlandes de fleurs sur son cercueil à Vienne lors de son enterrement. Il semble que l'edelweiss soit une fleur de malheur, car beaucoup de gens ont trouvé la mort en en cueillant.
RIEN de surprenant à Pompéi ces derniers temps, mais la recherche a au moins porté des fruits, car on a découvert une nouvelle maison, en aussi bon état que plusieurs maisons « à bon marché » de Londres, le tout étant dans un état de conservation tel qu'on croirait que la maison a été maquillée, en quelque sorte, lors de l'éruption. Les chambres sont décorées à merveille - certaines avec des peintures singulières qu'on ne peut vendre à l'enchère, puisque ce sont des fresques peintes sur les murs. Les savants anglais se précipiteront sans doute à l'annonce de la découverte.
« LE comble de l'impudence » a été atteint; en effet, il faudrait employer un mot plus dur pour qualifier le fait de refiler des copies au lieu des originaux, sans oublier les signatures contrefaites. Cela a incité M. Jacques de Biez à donner une conférence à l'intention de ses amis amateurs de peinture, au cours de laquelle il a fait une proposition singulière selon laquelle chaque artiste devrait enregistrer son œuvre, une fois achevée, dans une sorte de registre et y inscrire une description détaillée ainsi que les dimensions de la peinture. « Ainsi », de dire M. de Biez, « l'œuvre aura des droits civils, comme un citoyen de France, et le fait de l'enregistrer assurera sa protection. »
Image digitalisée de la page 407 : Divers [traduction]
LA duchesse Dowager de Hamilton passera l'hiver à Paris.
LE vétéran Earl Grey, fils du grand premier ministre, et lui-même un ancien membre distingué du Cabinet, a déclaré récemment dans une édition du Nineteenth Century que M. Gladstone, M. Bright et M. Chamberlain ont fait plus que la Land League pour encourager le désordre au sein de la nation irlandaise.
L'ALLEMAGNE, tout comme l'Angleterre, a reçu une édition révisée de la Bible. Ou plutôt, nous ne l'avons pas encore reçue; l'Allemagne a eu la sienne. Les corrections finales que les érudits ont apportées à la fameuse traduction de Luther ont été récemment présentées à l'empereur William. Peut-être s'agit-il après tout de la meilleure commémoration de Luther.
IL y a environ vingt ans, le défunt Lord Overstone avait publié, pour son propre plaisir, un recueil de textes choisis qu'il avait rédigé au fil de ses lectures d'œuvres de la littérature anglaise. Il s'agit d'un recueil volumineux, preuve d'une lecture étendue et attentive. C'est une bonne idée que de résumer tout ce qu'on aime d'un livre et d'en faire un volume, qui serait en quelque sorte sa propre bibliothèque au complet.
AU début de l'année, on fera une expérience intéressante dans le domaine du journalisme. On publiera un magazine rédigé exclusivement par les membres des classes supérieures. Un membre de la Chambre des pairs sera l'éditeur, et le magazine aura pour titre The Lords. Le dernier projet devrait commencer avec un feuilleton du comte de Desart.
UN NOUVEAU ténor fera probablement son apparition sous peu sur la scène anglaise, et il sera accueilli avec plus de plaisir parce qu'il est Anglais. La plupart des musiciens de Londres l'ont entendu interpréter des chants religieux. Il est le fils de Canon Wade, à l'église duquel, à Soho, la musique de la Passion de Bach a été interprétée admirablement pendant plusieurs saisons consécutives. La partition du ténor était interprétée par M. Arthur Wade, qui étudie en Italie depuis quelques années. Nous avons si peu de ténors actuellement, et si peu qui peuvent chanter des chants religieux, que M. Wade sera toute une acquisition pour la scène.
LES anecdotes au sujet de la « sage économie distinguée » relatées par le défunt Lord Overstone rivalisent avec certaines anecdotes venant des économistes du début du siècle. Un jour, un gentleman qui avait été invité à dîner chez Lord Overstone raconte que, en voyant deux perdrix sur la table, le noble hôte avait fusillé le maître d'hôtel du regard et, après avoir découpé l'oiseau en portions économiques pour lui-même, son invité et un autre visiteur, et laisser l'autre perdrix intacte, il avait fait remarquer au domestique, qui tremblait : « Ne t'avais-je pas dit ce matin qu'une seule suffirait? »
LA conduite bizarre du « William du peuple » a donné lieu à des distractions récemment. M. Gladstone a remercié le Hackney Radical Club pour avoir approuvé les politiques de Lord Ripon en Inde, mais, le jour suivant, le premier ministre a renoncé à la majorité des politiques de Sa Seigneurie dans ce pays. Le lendemain matin, le Conseil politique du Hackney Club a eu l'audace de publier sa lettre, et maintenant l'opinion est divisée concernant la cause et le motif de la perversion de M. Gladstone du conservatisme au parti Whig et sa dégénération finale vers le radicalisme.
SELON un journal mondain, une des raisons personnelles de la visite du cardinal Manning à Rome est d'obtenir la nomination de l'évêque Vaughan, de Salford, comme son coadjuteur, avec droit de succession. Le Cardinal voit en l'évêque Vaughan, si ce n'est son double, quelqu'un qui comprend son point de vue et qui mettra en œuvre ses politiques. Le Dr Vaughan, qui est membre d'une ancienne famille catholique d'origine anglaise, serait mieux accueilli, probablement, par les dirigeants laïcs, qui le connaissent mieux que le clergé. Toutefois, il semble peu probable que le pape Léon XIII se mêlera des affaires du cardinal Manning, même si, selon le droit canonique, ce dernier devrait présenter trois candidats à l'approbation ou au rejet du Saint-Siège.
LA popularité de la chaire en est venue à avoir une fausse signification. Aujourd'hui, le prédicateur célèbre est celui qui touche de l'argent et non pas celui qui émeut le cœur des gens lorsqu'il prêche la charité. Il est jugé à la façon d'un acteur, par les recettes au guichet. Que sa congrégation connaisse ou non des progrès spirituels sous ses conseils, que ses paroissiens apprennent ou non à embellir leur quotidien par la simplicité, la ferveur et la confiance, que les pauvres et les malheureux trouvent ou non aide et confort à sa porte, ce sont là des questions qui préoccupent très peu le public admiratif. Les gens mesurent la popularité du pasteur selon des normes laïques; et celui-ci est trop enclin à accepter leur jauge comme étant la bonne.
ON a décidé il y a longtemps quelle exposition suivrait celle des Pêcheries. Ce sera une exposition sur l'alimentation et la santé. C'est un thème apparenté aux Pêcheries, et il pourrait être encore plus intéressant et attirant. La cuisine fera partie de l'exposition. Les déjeuners et les dîners à des prix abordables seront de nouveau à l'avant-plan, car nous aurons l'assurance que nous pouvons servir le repas au million de visiteurs, dans une atmosphère de confort. Le spectacle de la soirée se mariera merveilleusement avec le volet manchette gastronomique. Il y aura un grand concours vinicole. Les producteurs de champagne et les négociants ont déjà commencé à prendre des dispositions pour en tirer renommée et profit. Les édifices utilisés seront mis à profit, bien qu'ils aient plutôt l'air de baraques et qu'ils soient dépourvus de logement convenable. Cela devrait être rectifié, étant donné que l'exposition sur les Pêcheries a rapporté gros et, sans aucun doute, l'exposition sur l'alimentation ajoutera à ce fonds.
QUELLE est la différence entre un « Dhutuja Chula Chom Klao » et un « Phra Wongs Th'oe Ong Chow »? Elle doit être grande, car on va dépenser une grosse somme d'argent et faire une grande quantité de cérémonials lundi prochain à l'ambassade de Siam pour le changement du titre de Son Excellence. Les cérémonies orientales ont toujours un charme particulier dans l'esprit des Occidentaux, et tous les gens de la haute sans exception ont été invités à la cérémonie d'investiture du prince Prisdang, qui aura lieu lundi. L'ambassadeur siamois posté dans ce pays, en dépit des noms imprononçables de ses décorations et titres divers, est l'une des personnes les plus populaires du corps diplomatique. Il doit être également populaire dans son pays, à en juger par la distinction qu'on lui conférera sous peu et, en langage clair, cela signifie qu'il va être promu du rang de conseiller du roi à celui de prince royal, presque un membre de la famille royale. L'attention que portent ces potentats d'Extrême-Orient aux manières et aux coutumes européennes est un signe d'espoir et un étrange revirement des idées qui avaient cours parmi eux par rapport aux barbares de l'Ouest. Il y a maintenant plus d'un prince siamois qui fait ses études dans ce pays, tandis que plusieurs ont déjà goûté aux délices des villes continentales.
M. TENNYSON a habituellement de grandes objections par rapport aux apprentis... ou autres personnes qui le prennent en main avant qu'il ait dit son dernier mot, mais il s'est abstenu d'utiliser son droit de veto au profit d'un bel exposé à son sujet que Mme Ritchie, la fille de Thackeray, publie dans le numéro de Noël du Harper's Magazine. Pour cette occasion, il lui a lui-même dit beaucoup de choses concernant sa vie de jeunesse et elle y ajoute d'une main exercée des sentiments pleins d'admiration, des souvenirs personnels du grand poète invité et ami de la famille à la maison de son père, et des souvenirs de quelques amis qui sont encore en vie et qui faisaient partie du fameux et charmant cercle réunissant Tennyson, Thackeray, Carlyle et autres grands hommes. L'un d'entre eux, Edward Fitzgerald, le traducteur d'Omar Khayam, le meilleur ami de Thackeray, est mort alors que l'article était encore au stade des épreuves. L'article de Mme Ritchie sera accompagné de plusieurs illustrations montrant le lieu de naissance et les maisons de M. Tennyson ainsi que des endroits associés à son œuvre, dessinées par Alfred Parsons; on publiera aussi des portraits, y compris celui montrant M. Tennyson et les têtes charmantes des enfants de Tennyson peint par G.F. Watts, R.A., que M. Tennyson a permis de reproduire pour cet article; il y aura aussi plusieurs ébauches non publiées de Thackeray, Frederick Walker et Dante Gabriel Rossetti, à qui M. Robert Browning a prêté l'ébauche préliminaire de Tennyson en train de lire « Maud ». - The Critic.
L'omission d'une grande cérémonie publique, généralement observée par les familles juives d'Angleterre, à l'occasion d'un mariage - une vieille tradition de « se réunir pour la joie » - est survenue à l'occasion du mariage du grand Sassoon. Contrairement à la coutume habituelle, la cérémonie s'est entièrement déroulée dans l'intimité; seuls les membres de la famille ont été invités. « Se réunir pour la joie » est une des plus belles et émouvantes cérémonies parmi celles qu'ont léguées les anciens Hébreux à leurs descendants. Cette cérémonie comprend la signature du contrat de mariage comme cela se fait partout, mais d'une manière pure et primitive. Le marié et l'élue s'assoient côte à côte, main dans la main, dans la plus belle pièce de la maison. La porte est ouverte afin que tous les amis puissent y entrer. Les parents sont les premiers à entrer - ils sont les seuls à avoir le droit de s'asseoir. Ensuite, c'est le tour des amis intimes, qui font des compliments aux mariés dans la langue ancienne, et après, toutes les connaissances font le tour des deux mariés et les saluent. Sur la table, devant laquelle sont placés les époux, se trouve une coupe dans laquelle on dépose les cadeaux offerts par les invités, allant des pièces d'or et d'argent offertes par les riches, aux deniers de la veuve et aux rares sous des pauvres. L'argent ainsi obtenu est toujours envoyé au grand rabbin pour être distribué parmi les retraités juifs, afin que le jour du mariage soit un jour de réjouissance pour les riches et les pauvres. Chez les riches familles juives, les offrandes atteignent souvent un énorme montant, et l'on trouve parmi les pièces d'or et d'argent et même les modestes pièces de cuivre qui aident à remplir la coupe de joie, de gros chèques et de gros billets de banque. La coupe de joie a toujours été conservée comme une relique sacrée de la cérémonie.
Image digitalisée de la page 410 : In memoriam [traduction]
Ta mémoire nous sera toujours pure.
L'amour n'est pas mort, et ce qui nous semble
Relever du mystère et du malheur le plus profond,
Comme un zéphyr, à travers nos cœurs blessés soufflera.
Et nous poussera au cours de notre marche épuisante à travers les plaines,
En nous faisant signe de suivre. Ce qui reste maintenant,
Enveloppé dans l'obscurité hivernale du mont Royal,
Ne dit qu'à elle qui fleurira une autre fois -
Ne tient que le cercueil - notre perle est rentrée chez elle.
Philip J. Elliott
Montréal, décembre 1883.
Image digitalisée de la page 410 : Dirigé par des mains invisibles [traduction]
Un voyage à Montréal pour Noël et ses conséquences
Par W.S. Humphreys
« Vais-je arriver à temps? »
Je me répétais cette question sans cesse au moment de prendre place à bord de la voiture de chemin de fer qui m'amenait rapidement en direction de Montréal.
« Mais à temps pour quoi? »
Je ne le savais vraiment pas! Tout ce que je ressentais, c'était un désir irrésistible d'arriver à destination - pour faire je ne savais quoi.
La nuit précédente j'avais fait une sorte de rêve - un rêve dont je ne me rappelais pas très précisément - rien pour me causer une inquiétude inutile ; mais je m'étais réveillé trempé de sueurs froides et quelque chose me trottait dans la tête - quelque chose qui semblait au départ confus et flou, mais qui prit finalement la forme d'un avertissement quant à un péril imminent menaçant quelqu'un - quelqu'un ayant un lien avec moi - mais que je ne pouvais identifier.
J'ai tenté de me débarrasser de ce sentiment d'appréhension qui n'envahissait presque entièrement, mais en vain. Le sentiment s'intensifiait - un sentiment de terreur de je ne sais quoi. J'avais l'impression de devoir agir, et rapidement.
Après que j'eus avalé une tasse de café et que j'eus piètrement feint de manger le petit déjeuner savoureux que l'on m'avait préparé, je me dirigeai vers ma chambre, je plaçai des effets personnels dans une petite valise et je me précipitai à l'extérieur, sans but précis, dirigé par une pulsion irrésistible.
Mes pas me pressaient vers la gare, où j'arrivai quelques minutes avant la mise en marche du train. Je me procurai avec empressement un billet pour Montréal, je grimpai à bord et le train démarra.
Pourquoi avais-je pris le train pour Montréal? Je ne le savais pas. Une chose sur laquelle je n'avais absolument aucun contrôle semblait m'attirer. Appréhendais-je que quelque chose de terrible arrive à un ami dans la métropole canadienne? Cela était impossible, car la seule personne que j'avais jamais eu comme amie dans cette ville - que j'aurais par ailleurs aimé pouvoir appeler par un nom plus tendre - était mariée, selon ce qu'on m'avait dit, et était en Europe. À ma connaissance, je n'avais aucun parent ni ami à Montréal; mais je quittais quand même le confort de ma résidence de Boston pour faire un voyage long et ennuyeux au beau milieu de l'hiver - pourquoi? Je ne pouvais le dire; encore et toujours, la question me traversait l'esprit :
« Vais-je arriver à temps? »
Les arrêts étaient courts, mais le retard entraîné par chacun d'eux m'irritait et me rendait furieux. Je ne pouvais ni lire - ni dormir - ni bavarder avec mes compagnons de voyage; tout tourbillonnait dans ma tête. J'avais besoin que le train avance - et qu'il avance rapidement. Dans mon impatience, je demandai au chef de train de mettre plus de vapeur, en oubliant complètement que le train devait faire certaines correspondances; lorsque le train fit un arrêt très long, tel que je l'avais prévu, je descendis du wagon et allai trouver le mécanicien de locomotive afin de lui demander de se dépêcher. Quelles autres sottises avais-je faites? Je ne pouvais le dire, mais la question revenait sans cesse :
« Vais-je arriver à temps? Vais-je arriver à temps? »
Tous les voyages ont cependant une fin et j'aurais pu sauter de joie - peut-être l'ai-je fait, car je ne répondais plus de mes gestes au cours de ce voyage mémorable - lorsque de Saint-Lambert nous aperçûmes les lumières de Montréal. Le train traversa le pont, puis je me précipitai, comme plusieurs autres passagers, hors de la gare Bonaventure, une gare ferroviaire « classique ».
Où allais-je me diriger ensuite? J'étais arrivé Montréal en toute sécurité et quelque chose semblait me chuchoter que le moment était venu; mais que devais-je faire? Cette même pulsion irrésistible qui avait, jusqu'à maintenant, contrôlé mes gestes semblait toujours posséder tout mon être, et je m'abandonnai entièrement, si cela était possible.
Les autobus des différents hôtels étaient en attente et, avant même de m'en rendre compte, je me retrouvai à bord de celui qui appartenait au St. Lawrence Hall. Pourquoi celui-là? Je ne pouvais l'expliquer, car je n'étais jamais descendu à cet hôtel lors de mes séjours précédents à Montréal. Même une fois là-bas je ne pus me reposer. Après que mes quelques rares bagages eurent été montés à ma chambre, je me lavai en vitesse afin de me débarrasser de la poussière du voyage, j'enfilai quelques vêtements supplémentaires et je me dirigeai vers l'extérieur tout en remarquant, en passant devant le bureau, que l'horloge indiquait onze heures quarante.
Mais où allais-je? Je n'en avais pas la moindre idée au moment de quitter l'hôtel. Je semblais n'avoir aucun contrôle sur mes gestes. Quelque chose me guidait et je suivais aveuglément.
Je suivis la rue St-Jacques jusqu'à Bleury, puis la rue Dorchester en direction ouest. Étais-je sous l'emprise de cette force invisible au moment où je m'arrêtai en attendant des voix chanter un air doux? Je m'approchai et les paroles flottèrent à mes oreilles :
« Chrétiens, réveillez-vous! saluez l'heureux matin,
Qui a vu la naissance du Sauveur du monde;
Levez-vous afin d'adorer le mystère de l'amour
Qu'une multitude d'anges chantent du haut des cieux;
Chantez la bonne nouvelle, que l'on a aussitôt accueillie avec joie,
Celle de Dieu qui s'est fait homme, le Fils béni de la Vierge Marie. »
Que signifiait cela? Un chant de Noël! Était-ce possible? Je me posai ces questions rapidement, puis je me rappelai ce que j'avais oublié tout au long de mon voyage; c'était la veille de Noël, ou plutôt le jour de Noël, puisqu'il était passé minuit. J'avais quitté ma demeure de Boston en ce temps de réjouissance - pourquoi?
Tandis que les choristes chantaient des airs joyeux sur le coup de minuit, j'avançai rapidement sans le vouloir et les chants s'affaiblirent à mesure que je m'en éloignai :
« En ce jour Dieu a rempli sa promesse,
En ce jour un sauveur est né, le Christ notre Seigneur! »
Mais que pouvait bien être cette lueur pourpre dans le ciel? Écoutez! Le son des cloches - le galop des chevaux - le cri des hommes!
« Au feu! Au feu! »
J'entendis ce cri terrible qui détonnait tellement par rapport aux airs si doux que j'avais entendus plus tôt. Comme si j'avais des ailes, je me dirigeai vers la lueur et la question me traversa l'esprit encore une fois :
« Vais-je arriver à temps? »
Je ne sais comment j'avais fait pour trouver l'endroit, mais j'y arrivai en haletant en raison des efforts que je venais de faire et je découvris que le bâtiment en feu était une vaste demeure, de toute évidence celle d'un homme riche, d'après le premier coup d'œil que j'y avais rapidement jeté. Je vis que les pompiers travaillaient vigoureusement à éteindre le feu
Mais mon regard cherchait quelqu'un, une personne que je connaissais, mais que je ne pouvais trouver. Un cri parvint toutefois à mes oreilles :
« Ma fille! Y a-t-il quelqu'un qui va sauver ma fille? »
J'aperçus en me retournant un vieil homme aux cheveux gris qui se tordait les mains et dont les yeux étaient remplis d'eau.
« Où est-elle? » demandai-je avec empressement.
« Dans la partie de la maison sur laquelle ils travaillent actuellement », dit-il en indiquant la partie nord de l'immeuble, où le feu avait apparemment pris naissance.
« Une échelle! Une échelle! » criai-je en me dirigeant rapidement vers l'endroit qu'avait indiqué le vieil homme.
« L'échelle est là », répliqua quelqu'un; « mais c'est la mort certaine pour quiconque s'aventurerait là-haut. »
« J'essaierai quand même », dis-je avec empressement en me précipitant vers l'échelle.
Je fis alors une pause afin de regarder en haut - pour un instant seulement, même si la perspective aurait découragé le plus brave des cœurs. Il semblait que, pour ma part, j'avais perdu cette partie de divinité très nécessaire que l'on retrouve chez l'homme - je n'avais pas plus de contrôle sur ma personne à ce moment-là que je n'en avais eu de toute la journée - une force irrésistible me contrôlait toujours.
Ce que l'on apercevait était cependant horrible. L'incendie avait apparemment débuté à l'étage inférieur et s'était propagé au deuxième; les flammes sortaient des fenêtres comme de grandes vagues consommant tout sur leur passage. Un grand nuage de fumée se dégageait des fenêtres des étages supérieurs, et je devais me rendre au troisième.
J'aperçus tout cela du coup d'œil que j'avais jeté vers le haut, en tenant mon pied sur le premier barreau de l'échelle. Je me précipitai ensuite dans l'échelle. Les cris d'avertissement résonnaient dans mes oreilles :
« Revenez! Revenez, sans quoi vous êtes mort. »
Je montais toujours plus haut à travers la fumée aveuglante et les flammes brûlantes. La sueur coulait à grosses gouttes sur mon front - je respirais à petits coups. Je montais encore et me trouvais maintenant au-dessus du deuxième étage; la chaleur était presque insupportable. Je montais encore et encore - j'atteignis finalement le troisième étage et je fis une brève pause avant d'entrer par la fenêtre ouverte, de laquelle sortaient d'épais nuages de fumée ainsi que des vapeurs brûlantes. Je me précipitai ensuite dans la pièce et me frayai un chemin à tâtons dans l'obscurité. Je ne peux dire quelle direction j'ai prise. Je me sentais pressé et guidé par cette force invisible et incontrôlable qui avait dirigé tous mes gestes durant toute la journée. Selon toute vraisemblance, je traversai directement la pièce jusqu'à une porte ouverte que je franchis et je m'engageai en vitesse dans un long corridor au bout duquel j'entrai dans une autre pièce, lorsque quelque chose me poussa à faire une pause. Cette même force invisible me dit alors d'arrêter et de chercher à tâtons sur le plancher. Après quelques instants, mes mains touchèrent ce qui me sembla immédiatement être l'objet de mes recherches. En soulevant le corps, je me tournai afin de revenir sur mes pas. Mais la fumée était alors devenue beaucoup plus dense et elle sortait par toutes les fissures du plancher. J'entendais le feu qui craquait sous mes pieds; des flammes se dressaient parfois directement sur mon chemin. Mais je ne tenais compte d'aucun de ces éléments et, bien que je fus presque suffoqué, je tenais fermement le fardeau que je portais et je poursuivais frénétiquement mon chemin.
J'avançais toujours d'un pas rapide. J'avais franchi le corridor et je me trouvais à la porte de la pièce par où j'étais entré, lorsqu'une partie du plancher s'effondra et que les flammes montèrent juste devant moi. Mais je ne m'en souciais pas. En fait, je n'avais absolument pas la force de m'arrêter. Je bondis à travers la fournaise enflammée et j'atterris sain et sauf de l'autre côté, presque épuisé.
J'y fus accueilli par une bouffée d'air et je savais que je me trouvais près de la fenêtre. Toujours à tâtons dans l'obscurité, je trouvai rapidement l'ouverture; l'échelle s'y trouvait toujours. Je sortis et je descendis quelques échelons, - je chancelai et craignis de perdre pied, l'ai repris pied et je descendis encore et encore - puis j'entendis un grand cri - je tombai - et je ne me souvins plus du reste.
Combien de temps suis-je demeuré inconscient? Je n'en sais rien. J'étais maintenant éveillé et je jetai un coup d'œil dans la pièce, mais tout m'était inconnu. Je tentais de réfléchir, mais mon esprit était confus, des bruits étranges semblaient surgir dans ma tête. Mon corps semblait tout endolori. Je tentai de me retourner sur mon oreiller, mais mon bras tressauta terriblement, m'avertissant ainsi de rester étendu sans bouger. Je ne savais ni où j'étais ni comment j'y étais arrivé; mais tandis que je ruminais sur mon état présent et que j'essayais d'éclaircir le mystère, j'entendis de nouveau cet air doux :
« Chrétiens, réveillez-vous! saluez l'heureux matin,
qui a vu la naissance du Sauveur du monde. »
La mémoire me revint et je me rappelai tout ce qui s'était produit depuis mon départ de Boston et je dis sans le vouloir :
« Oh! Suis-je arrivé à temps? »
Ces paroles, qui n'étaient guère plus audibles qu'un murmure, avaient été entendues et une voix aimable répondit :
« Avez-vous dit quelque chose, mon garçon? »
Je connaissais sûrement cette voix, mais je me demandais où j'avais bien pu l'entendre, alors que je répétais ma question précédente :
« Suis-je arrivé à temps? »
« À temps pour quoi, Fred? », dit la même voix; en se déplaçant de mon côté du lit, mon interlocuteur se pencha au-dessus de moi.
Je jetai un coup d'œil vers le haut et je fus très surpris de voir M. Hartley, mon ancien employeur.
« Monsieur Hartley? » m'écriai-je.
« Oui, mon garçon; ne me connaissiez-vous pas? »
« Mais je ne comprends pas », dis-je d'abord, confus. « Comment me suis-je retrouvé dans votre maison? »
« Ce n'est pas ma maison, Fred », répondit le vieil homme. « Ma maison, comme vous le savez, a brûlé hier soir et nous logeons temporairement au domicile d'un gentil voisin. Mais, mon garçon, dites-moi, ressentez-vous quelque douleur? » ajouta-t-il avec sollicitude.
J'avais complètement oublié ma blessure au bras en raison de l'agitation causée par la présence de mon ancien employeur et je tentai de me soulever du lit, mais une vive contraction me fit grimacer au moment où je répondais :
« Je ressens une légère douleur; mais dites-moi, M. Hartley, votre fille est-elle saine et sauve? »
« Oui, mon garçon, grâce à vous, aujourd'hui elle est vivante et elle se porte bien. Aucun mot ne peut exprimer ma gratitude pour ce que vous avez fait », dit le vieil homme, ému. « Mais Amy elle-même vous remerciera. Je vais aller la chercher. »
« Eh, non, non, non! » m'exclamai-je, car j'avais le sentiment que ne pouvais pour le moment supporter de rencontrer la femme que j'avais aimée et que j'avais perdue.
« Mais oui, oui, oui! » répondit le vieil homme, qui quittait la pièce en gloussant.
Une fois seul, mon esprit retourna aux jours heureux d'il y a longtemps. Je me souvenais que, jeune garçon, j'étais entré au bureau de M. Hartley à titre d'assistant et que j'avais graduellement gravi les échelons jusqu'au poste de commis de confiance. J'y étais traité plus comme un ami que comme un employé. Je me souvenais d'avoir un jour été chargé d'aller à sa résidence et d'y avoir rencontré la petite Amy, sa fille, qui était d'âge scolaire, et, plus tard, d'avoir été invité à dîner avec sa famille et d'y avoir encore rencontré, non pas la petite fille, mais la belle jeune femme. Je me souvenais que je l'avais aimée comme écolière, mais mon amour pour elle en tant que femme a décuplé. Je me souvenais des nombreuses soirées joyeuses passées en sa compagnie, jouissant pleinement des premiers jeunes rêves d'amour. Je me souvenais de la première fois que je lui avais parlé d'amour, et des paupières tombantes de la belle jeune fille qui répondait à mes confidences. Je me rappelais le premier baiser d'amour passionné que j'avais posé sur ces lèvres pures ainsi que les nombreux projets que nous avions pour l'avenir. Mais quel avenir! comme il s'est avéré sombre! M. Hartley, qui avait été mon ami dans tous les domaines des affaires, ne voulait absolument pas que je me fiance avec sa fille. Il ne pouvait pas le concevoir - l'idée que son commis ait l'audace de songer à épouser sa seule enfant et sa seule héritière lui paraissait grotesque. Je lui offris d'attendre, en lui disant que je partirais, que je ferais fortune et que je reviendrais afin de lui demander la main de sa fille. Mais rien n'y fit! M. Hartley me dit qu'il avait un autre point de vue sur la question et que je devais abandonner tout espoir. J'allai alors trouver Amy et je lui demandai de m'épouser au mépris de son père, mais la jeune femme déclara catégoriquement qu'elle ne pourrait jamais se marier sans le consentement de son père. Comme ce consentement semblait impossible à obtenir, je démissionnai de chez M. Hartley, car je me croyais incapable de demeurer dans la même ville qu'Amy et de voir un autre homme aspirer à ce que j'avais si ardemment désiré. Je me rendis alors à Boston et tentai d'oublier Amy en travaillant beaucoup. Cela fut cependant impossible, en dépit du fait qu'un peu plus d'un an auparavant, on m'avait informé qu'elle avait épousé l'homme choisi par son père, un cousin, et qu'elle était allée en Europe pour son voyage de noces. Toutes ces choses me traversèrent rapidement l'esprit, puis je me souvins qu'il s'agissait de la femme que j'avais sauvée d'une mort horrible la nuit précédente - la femme que j'aimais plus que ma propre vie et pour qui j'étais venu de Boston afin de la sauver du danger de mort qui la menaçait - la femme d'un autre homme.
Mais je fus interrompu dans mes pensées par un léger bruit de froissement de soie et je sentis - car je ne pouvais pas encore regarder - que quelqu'un se penchait sur moi et, quelques instants plus tard, on prononçait ce mot
« Fred! »
Le timbre doux de cette voix que j'avais jadis si bien connue et tant aimée fit passer un frémissement dans tout mon corps et la béatitude que me procurait le fait de l'avoir encore une fois à mes côtés me faisant tout oublier, je m'écriai :
« Oh, Amy! Mon amour! Mon amour! »
Et avant que je puisse penser à ce que j'étais en train de faire, j'avais approché son doux visage du mien et j'avais embrassé ses lèvres pures.
Mais l'idée qu'elle appartenait à un autre ressurgit rapidement, et je la lâchai, la repoussai et lui criai :
« Oh, que suis-je en train de faire. Pardonnez-moi. Que dirait votre mari s'il avait vu ce que j'ai fait? »
« Mon mari? », demanda-t-elle. « Que voulez-vous dire? »
« Ce que je veux dire? Simplement que je crois que vous êtes la femme de votre cousin et que la liberté que j'ai prise à l'instant, bien qu'elle m'ait été très agréable, pourrait être considérée autrement par ce dernier. »
« Mais vous faites erreur », répondit-elle; « lorsque nous nous sommes quittés je vous ai dit que je vous serais fidèle et j'ai tenu promesse. »
« Et vous serez mienne, Amy? » implorai-je, en la prenant encore avec le bras sur lequel j'avais du pouvoir.
« Oui, comme je l'ai toujours été, vôtre pour toujours », répondit-elle en posant son visage dans le creux de mon épaule.
Après quelques minutes de béatitude totale, nous fûmes interrompus par l'entrée de M. Hartley. Le vieil homme comprit au premier coup d'œil de quoi il en retournait; il s'avança près de nous, prit la main de Amy, la mit dans la mienne et dit :
« Prenez-la, Fred, mon garçon; vous l'avez honnêtement méritée. »
Puis, après une pause, il poursuivit :
« Et maintenant dites-nous comment il se fait que vous étiez à Montréal à un moment si opportun et comment il se fait que vous n'ayez pas reconnu la maison qui brûlait ni le vieil homme qui vous a demandé de sauver sa fille. »
Je leur racontai donc toute l'histoire, tel que je l'ai fait précédemment, à partir de mon départ de Boston jusqu'à mon réveil il y a peu de temps, comment j'avais été entraîné par une pulsion incontrôlable et comment j'avais été, du début à la fin, pressé par une force invisible sur laquelle je n'avais aucun contrôle. Lorsque j'eus terminé, M. Hartley dit :
« C'est une histoire franchement merveilleuse! Votre amour pour Amy vous a mené à elle lorsqu'elle faisait face à un danger imminent; c'est donc en toute confiance que je vous l'a confie. »
« Mais lorsque je suis tombé? », demandai-je. « Je ne me souviens de rien après ma chute. »
« Vous n'êtes tombé que d'une hauteur d'environ dix pieds », répondit M. Hartley. « Lorsqu'on vous a aperçu descendant l'échelle avec votre fardeau, les hommes qui se trouvaient au-dessous ont rapidement placé de la literie et d'autres objets sous l'échelle afin d'amortir votre chute, au cas où vous auriez perdu pied. Lorsque vous êtes tombé, Amy a été attrapée, sans être blessée, par des gens qui attendaient au-dessous. Vous n'avez pas eu une telle chance, mais je crois que ce soir vous aurez suffisamment récupéré pour pouvoir vous lever. »
Le dénouement de l'histoire démontrait donc que, outre une luxation de l'épaule, de graves ecchymoses, quelques brûlures légères et la perte de ma moustache, mon aventure de la nuit précédente n'avait eu sur moi aucun effet fâcheux ; et avec Amy à mes côtés et entouré d'amis aimables, la nuit de Noël passa beaucoup trop rapidement.
Deux jours plus tard, je retournai à Boston afin de mettre de l'ordre dans mes affaires, puis je revins peu après à Montréal, où mon ancien employeur me réembaucha et me donna, en temps opportun, la main de sa fille, ma belle épouse.
De nombreuses fêtes de Noël ont passé depuis ces événements, et demain il y en aura une autre. Pendant que je suis assis à écrire ces mots, j'entends de jeunes voix s'exerçant pour le grand festival et les paroles me rappellent des jours passés. Ma femme, qui entre maintenant dans la pièce, chante aussi cet air doux et, posant ma plume, j'entonne la glorieuse invocation :
« Chrétiens, réveillez-vous! saluez l'heureux matin,
Qui a vu la naissance du Sauveur du monde;
Levez-vous afin d'adorer le mystère de l'amour
Qu'une multitude d'anges chantent du haut des cieux.
Chantez la bonne nouvelle, que l'on a aussitôt accueillie avec joie,
Celle de Dieu qui s'est fait homme, le Fils béni de la Vierge Marie. »
IL semble convenu que si la machine électrique pouvait être maintenue à une certaine distance, l'éclairage serait beaucoup plus répandu dans les résidences privées. C'est ce qui a été fait en ce qui concerne la ligne Metropolitan. Entre Nottinghill Gate, Edgware road, Gower street et King's Cross, un nouveau système a été mis en place et il fonctionne actuellement très bien. Le moteur se trouve à Edgware road; le courant électrique peut être transmis le long des câbles à partir de ce centre, ce qui représente une distance de quinze milles. Si cette réalisation peut être améliorée, nous aurons bientôt l'éclairage électrique non seulement au pas de nos portes, mais aussi à l'intérieur de nos maisons.
Image digitalisée de la page 410 : Chapitre II [traduction]
« Malden, Massachusetts, le 1er février 1880.
Messieurs,
J'ai souffert de graves migraines. »
J'ai souffert de névralgie, un mal qui touche les femmes, de la façon la plus terrible et la plus atroce qui soit.
Aucun remède ni aucun médecin n'a pu me soulager ni me guérir jusqu'à ce que j'utilise Hop Bitters.
« La première bouteille m'a presque guérie. »
La seconde m'a redonné « la forme et la vigueur de mon enfance. »
« Et je me porte ainsi depuis. »
Mon mari a été infirme pendant vingt ans; il souffrait d'une grave maladie rénale, hépatique et urinaire.
Les meilleurs médecins de Boston ont déclaré que sa maladie était « incurable! »
Sept bouteilles de votre amer l'ont guéri et je sais que votre produit a « sauvé la vie de huit personnes » dans mon quartier.
De nombreuses autres personnes l'utilisent et en ressentent les bienfaits.
Il est presque miraculeux!
- Mme E.D. Slack.
Image digitalisée de la page 411 : Jeanie Morrison [traduction]
À l'est j'ai erré, à l'ouest j'ai erré,
Par bien des chemins difficiles;
Mais jamais, jamais, je ne pourrai oublier
L'amour du temps de ma jeunesse!
Le feu qui s'embrase dans la nuit de Beltane,
Pourrait bien n'être que cendres avant Noël;
Mais le sort d'un cœur
Qui a perdu son amour est plus noir que les cendres.
Ô chère, chère Jeanie Morrison,
Les réminiscences des années passées
Jettent encore leur ombre sur mon chemin,
Et elles emplissent mes yeux de larmes!
Elles m'aveuglent de tant, tant de larmes,
Et triste et malade, je m'afflige,
Quand ma mémoire évoque vaguement
La joyeuse lueur d'autrefois.
Oh! Mon amour, combien loin derrière
Avons-nous laissé la ville bruyante et son tapage
Pour vagabonder le long d'un vert ruisseau,
Et écouter le chant de ses eaux?
Au-dessus de nos têtes bruissait le feuillage estival,
Tout autour de nous s'épanouissaient les fleurs,
Et dans le crépuscule des bois
Sifflait doucement la grive.
Dans les bois sifflait la grive
Pour les arbres chantait le ruisseau,
Et en accord avec la nature chantaient
Nos cœurs à l'unisson;
Et sur le monticule surplombant le ruisseau,
Pendant quatre heures nous nous sommes assis côte à côte,
Heureux en silence jusqu'à pleurer
Tous deux de joie!
Oui, oui, chère Jeanie Morrison,
Des larmes ont roulé sur ta joue
Comme des perles de rosée sur une rose, mais ni l'un ni l'autre
N'avait le pouvoir de parler!
C'était un temps, un temps béni,
Quand nos cœurs étaient purs et jeunes,
Quand tous les sentiments jaillissaient librement,
Sans rimes - ni raison!
Je m'émerveille même, Jeanie Morrison,
Ai-je été aussi étroitement
Lié à toi par ces premières pensées
Que tu l'as été à moi?
Oh, dis-moi, avant que leur musique emplisse
Ton oreille comme elle emplit la mienne;
Oh, dis-moi d'abord que jamais ton cœur n'a connu autant d'intimité
Que dans ces rêveries d'autrefois?
À l'est j'ai erré, à l'ouest j'ai erré,
Un pénible sort j'ai supporté;
Mais pendant toutes ces errances proches ou lointaines,
Je ne t'ai jamais oubliée.
La source qui a jailli de ce cœur la première,
Continue de couler;
Et son flot de creuser un lit plus profond,
Pour l'amour de ma jeunesse.
Ô chère, chère Jeanie Morrison,
Depuis que tout jeunes nous nous sommes quittés,
Je n'ai jamais revu ton visage, ni entendu
Le chant de ta voix;
Mais je pourrais embrasser toutes les détresses,
Et je pourrais être heureux,
Si seulement je savais que ton cœur rêve encore
D'autrefois et de moi!
William Motherwell, l'auteur de cette chanson, naquit à Glasgow, en Écosse, en 1797. Dès qu'il sut lire, il manifesta une préférence et un goût marqués pour la poésie et, en 1819, il devint l'éditeur d'une petite publication originale intitulée : « The Harp of Renfrewshire ». La même année, il fut nommé shérif adjoint de Renfrew - un poste qu'il conserva pendant seize ans. Il fut un antiquaire enthousiaste et consacra bon nombre de ses heures de loisir à étudier les débuts de la littérature écossaise - en particulier la poésie. En 1827, il publia un recueil de ballades écossaises accompagnées d'une introduction dans laquelle il écartait beaucoup d'affirmations populaires, mais erronées, qui avaient prévalu concernant plusieurs de ces vestiges intéressants d'un âge révolu. Il fonda aussi un magazine à Paisley, dans lequel il publia bon nombre de ses meilleures chansons, mais ce magazine n'existe plus depuis longtemps. À l'époque où il travaillait activement à recueillir du matériel destiné à la rédaction d'une biographie du poète Tannahill, il mourut subitement d'une crise d'apoplexie à l'âge de trente-huit ans. Il était aimé d'un grand cercle d'amis pour ses talents supérieurs, ses qualités et ses goûts. Un recueil de ses poèmes fut publié peu de temps après sa mort, et l'accueil chaleureux que lui réserva le public montra combien il était tenu en haute estime par toutes les classes. Il y a très peu de ballades écossaises contemporaines qui peuvent égaler en tendresse et en émotion celle qui s'intitule " Jeanie Morrison ". L'héroïne de cette chanson était vraiment une camarade de classe de Motherwell, une jeune fille dont la beauté et la camaraderie de jeunesse laissèrent une empreinte si indélébile sur le jeune cœur du poète qu'il lui garda son amour pendant tout le reste de sa vie. Ils se quittèrent alors qu'ils étaient tous deux encore très jeunes et ne se revirent pas avant la parution de la chanson précitée, près de trente ans plus tard.
Mais le temps et les circonstances avaient presque effacé de la mémoire de Jeanie Morrison « l'amour du temps de la jeunesse ». Elle était mariée depuis bien des années et connaissait le bonheur de vivre dans un foyer heureux et d'avoir une autre mignonne petite Jeanie Morrison, qui était tout le portrait de celle qui s'était tant attaché le cœur de l'écolier amoureux. Ils restèrent cependant de très bons amis jusqu'à ce que la mort du poète les sépare pour toujours en 1835.
Image digitalisée de la page 411 : Petits dîners [traduction]
Pour être une réussite, le petit dîner devrait comprendre de six à douze convives bien choisis, des gens brillants, intelligents et sociables, qui entretiendraient le feu roulant de la conversation en passant « des sujets graves aux sujets gais, de la gaieté à la gravité ». La pièce bien éclairée, bien chauffée, et une jolie table bien disposée suffiront à elles seules à donner un sentiment de bien-être aux gens qui arrivent de l'extérieur par temps froid. Le dîner pour un petit groupe devrait être léger. Un potage clair, du poisson, deux bons plats de résistance (l'un de viande blanche, l'autre de viande rouge), une selle du meilleur mouton, bien faisandée, dépecée, du gibier et deux desserts bien choisis, dont l'un serait une bombe Alaska, et un mets non sucré devraient suffire. Mais tout devrait être bien cuit, aussi chaud que possible sinon plus, la viande bien faisandée, et la soupe, le poisson et les plats de résistance, parfaits en leur genre. Un dîner comme celui-ci devrait être servi à une table ronde, et le vin devrait être de la meilleure qualité de sa catégorie; quel homme, en effet, et quelle femme ne dirait pas alors : « Le destin ne peut me frapper; j'ai dîné aujourd'hui. » Afin d'être bien fait, tout cela doit occasionner du souci à la maîtresse de maison. Mais si elle est le bon genre de femme, ces attentions seront un plaisir; et si elle n'est pas le bon genre de femme, aucun petit dîner ne sera jamais une réussite chez elle, même servi à une table ronde. Les décorations de la table attestent à elles seules des capacités de la maîtresse de maison. Chez certaines femmes, c'est un don inné; d'autres n'ont pas le moindre talent artistique. À cette époque de l'année, un joli arrangement consiste en une pièce de tissu pelucheux bleu paon, disposée au centre de la table, agrémentée de petits bouquets de fougère cheveu-de-Vénus et de gros chrysanthèmes japonais blancs ou jaunes; et, s'il n'en tenait qu'à moi, aucun dessert ne devrait jamais être disposé sur la table. Un menu devrait être clairement écrit pour chaque invité. Le dîner devrait aussi être soutenu d'une « fête de l'esprit et d'un flot de sentiments », une bonne part de cela revenant à l'hôtesse, si elle est une femme intelligente, capable de lancer les sujets de conversation et de les entretenir sans que cela paraisse. Le dîner devrait ensuite se terminer par un petit dessert, un peu de Château Margaux chambré, un bon café bien préparé. Après cela, quand ils passeront au salon, la plupart des gens seront d'humeur parfaite à s'amuser et se laisser divertir.
La plupart d'entre nous ont eu la mauvaise fortune de connaître un tout autre genre de petit dîner, où tout va mal du début à la fin. Dès que l'on passe le seuil de la porte, le sinistre pressentiment de notre destin nous envahit quand des odeurs mélangées de cuisson, de graisse et d'autres choses désagréables touchent nos sens olfactifs; la domestique nous fait entrer dans un salon froid et décoré de façon guindée, où le feu, à moitié éteint, lutte en vain contre l'obscurité des lampes nauséabondes et mal entretenues. La maîtresse de maison est vêtue avec recherche mais sans goût, et des étages supérieurs nous parviennent des cris de malheur. Nous descendons dîner; la soupe est claire, le saumon est à moitié cru ou il tombe en lambeaux; les plats de résistance, qui viennent manifestement de chez le pâtissier, consistent en un vol-au-vent garni des cuisses de poulet du souper chic de la veille, et en un plat de côtelettes manifestement réchauffé; le gigot est dur et pas assez cuit, et le gibier, immangeable; les desserts sont mal choisis et servis de façon pire encore. C'est un petit dîner où les hommes sont lugubres et où les femmes s'ennuient. La maîtresse de maison laisse les choses entre les mains d'un personnel incompétent. Nous avons tous subi ce genre de choses chez nos amis et fait le vœu de ne plus le subir de nouveau, s'il nous est possible de l'éviter. Alors, si le dîner avait consisté en une bonne soupe, du poisson bien cuit, un bon cuisseau de mouton, une tarte aux fruits et à la crème, le tout accompagné d'un morceau d'un bon fromage pour finir, et servi dans une pièce bien chauffée, très peu d'entre nous auraient eu de quoi se plaindre.
Le petit dîner, s'il est bien fait, est un moment radieux et joyeux dans notre vie. Mais si la maîtresse de maison n'est pas capable de bien le faire, il serait préférable qu'elle s'en abstienne. Quand je dis bien fait, je ne veux aucunement dire qu'il doit être la cause de dépenses importantes pour l'hôte. Il est tout à fait possible, en y prenant soin et par une bonne gestion, d'offrir un petit dîner parfait qui sera beaucoup plus radieux et agréable à la fois pour l'hôte et pour l'invité, sans que son coût dépasse les moyens du genre de personnes auxquelles je fais allusion.
Le grand art d'offrir à dîner consiste à ne jamais tenter de faire plus que votre propre personnel ne peut en faire; à ne pas servir des plats que notre cuisinier ne peut préparer avec preuves à l'appui et à faire en sorte que la maison, la table et le dîner montrent tous que ceux qui en avaient la responsabilité ont pris soin de faire de ce petit dîner une réussite. Et si madame demande à son seigneur et maître un petit peu plus d'argent pour les factures du mois, ce dernier sait qu'il obtient quelque chose en retour; et, sachant combien de plaisir social il donne et reçoit, il ne rechignera pas à faire cette dépense et se plaindra tout juste qu'elle ne soit pas sans se répéter fréquemment.
Image digitalisée de la page 411 : Vices du théâtre [traduction]
La scène a ses vices comme le public a les siens. L'un des pires d'entre eux est la prononciation négligée de plusieurs acteurs d'aujourd'hui. Ils ne prononcent en rien leurs mots distinctement; ils ne se donnent pas la peine de parler assez fort pour que tout le public entende. Ils marmonnent et parlent entre leurs dents, et récitent les mots à la hâte comme s'ils étaient pressés d'en finir. Il est probable que le système d'« association », et son uniformité démoralisante, soit largement responsable de cela, bien que cela se voie quelquefois chez des membres plus jeunes des compagnies de théâtre. Quel agréable contraste, par rapport à ce travail peu soigné, quand un acteur bien formé - très souvent un jeune acteur - se présente en articulant ses mots distinctement et en parlant sur un ton qui porte dans tout le théâtre, que ce soit à voix basse ou à haute voix. Ces interprètes négligents devraient se rappeler qu'ils négligent un détail qui est l'une des premières conditions du succès.
Un autre petit vice de la scène qui semble être en vogue actuellement est celui des acteurs qui reviennent recevoir les applaudissements après être sortis de scène pendant que se poursuit la pièce. Cela détruit complètement l'illusion et viole les règles de l'art. Cependant, on a vu cela la semaine dernière chez l'une des meilleures parmi les quelques compagnies théâtrales de New York.
Quant aux vices des publics, ils sont légion. Les gens qui arrivent en retard, les gens qui parlent fort, les gens qui chuchotent en sifflant, ce qui est pire que de parler fort, les femmes qui portent de grands chapeaux, les hommes qui sortent chaque fois que le rideau tombe, passant devant toute une rangée de gens pour ce faire, et qui reviennent en répandant autour d'eux des effluves de bar; les gens qui prennent les sièges qui ne leur sont pas assignés et qui causent du bruit et de la confusion lorsqu'il faut les sortir - voilà quelques-uns des groupes criminels dans un public de théâtre.
Image digitalisée de la page 411 : Réminiscences d'un conducteur [traduction]
« Oui, monsieur », poursuivit le conducteur, « nous les cheminots avons de drôles d'aventures avec la fraternité des vagabonds. Presque tous ceux qui sont des passagers clandestins ont de l'argent et préfèrent courir le risque de s'embarquer clandestinement plutôt que de payer le prix du billet. Lors d'un accident, il y a quelques années, un passager clandestin a été tué; il avait sur lui 500 $ et des papiers attestant qu'il était propriétaire d'une écurie de louage en Californie. Il est remarquable de constater à quel point certains peuvent être obstinés. Certains d'entre eux s'étaient embarqués clandestinement dans le réservoir d'eau d'une locomotive " morte " qui était remorquée au milieu d'un train de marchandises, et lorsqu'ils furent découverts, ils refusèrent de sortir et dirent au conducteur qu'ils voulaient le voir ramper à l'intérieur et les mettre dehors. Un meilleur plan s'est présenté de lui-même - il consistait à tirer la locomotive jusqu'au réservoir et à les submerger pour les sortir. Ils capitulèrent lorsqu'ils furent trempés par environ six pouces d'eau glacée et ils sortirent tous comme des rats noyés, à l'exception d'un gros Irlandais, qui ne fut pas capable de passer par le trou jusqu'à ce qu'il eût retiré ses vêtements et que le mécanicien l'eût enduit d'huile noire.
« Les mécaniciens d'une division de l'Ouest devaient éteindre leurs moteurs assez souvent, à cause de l'eau qui causait des difficultés. On fait cela en ouvrant un robinet qui laisse échapper l'eau et la vapeur directement sous la cabine. Alors qu'un train rapide roulait à toute vitesse dans la nuit, le mécanicien jugea nécessaire de "la souffler à l'extérieur" et ouvrit un robinet; un cri presque sinistre s'éleva de sous ses pieds. Appliquant le frein à air comprimé et en faisant machine arrière, le train arrêta brusquement, et tous se bousculèrent pour voir d'où venait le cri inhabituel. Là, sur la voie, déchiré en morceaux par les roues et ébouillanté jusqu'à en être méconnaissable, se trouvait le cadavre d'un homme qui s'était embarqué clandestinement sur le triangle de frein du réservoir de la locomotive, de façon à être près de la chaleur du dispositif d'alarme, et il avait reçu tout le flot de vapeur et d'eau chaude sur lui et avait été projeté de son siège peu sûr, sans avertissement, jusque dans l'éternité, s'ajoutant ainsi à cette longue liste de "portés disparus". »
Image digitalisée de la page 411 : Échos de Londres [traduction]
LONDRES, 1er déc.
M. ALFRED DE ROTHSCHILD a fait éclairer sa voiture au moyen d'électricité stockée dans des accumulateurs situés sous le système B.T.K.
LE COMTE GLEICHEN travaille à un buste de Mademoiselle Anderson. Cela pourrait être quelque peu risqué pour lui. Pygmalion et Galatée pourraient s'en trouver paraphrasées.
UNE AUTRE entreprise de câblodistribution a été créée à New York afin de tendre deux câbles entre l'Angleterre et l'Amérique.
LES PRÉPARATIFS destinés à la création d'un nouveau journal illustré sont, dit-on, presque terminés. Il doit être « dirigé » selon les lignes des célèbres magazines illustrés américains.
QUELQUES journalistes sont sur le point de lancer un club reposant sur un principe par actions. Les parts seront de 5 livres chacune, et les gens qui lisent et qui n'écrivent pas auront la permission d'y souscrire, à titre de faveur.
L'UN des arguments extraordinaires que l'on fait valoir contre le métro qui est proposé entre Paddington et Westminster, c'est qu'il détruirait toutes les racines des arbres et qu'il aurait des conséquences graves sur la serpentine. C'est prodigieux!
PRÈS de 300 concurrents s'affrontaient pour remporter le prix offert par l'Alhambra Theatre pour la meilleure allocution en vers présentée lors de l'ouverture du théâtre lundi. Le candidat victorieux est M. Vernon de Montgomery.
ON comprend que la visite de sir Charles Dilke au château de Windsor cette semaine venait d'un ordre de la reine, ce qui est fortement révélateur de l'intérêt que Sa Majesté porte à la condition des pauvres de Londres.
UN CURIEUX rapport circulait il y a quelques jours selon lequel M. Wilkie Collins était sur le point de publier un roman dans le Times, parmi tous les journaux du monde. Cela était manifestement absurde. Le roman doit paraître dans certains hebdomadaires, et par épisodes publiés mensuellement en temps et lieu.
IL ne fait aucun doute que le ballet « Excelsior » sera produit au Covent Garden Theatre cette année. On nous dit que « tous les préparatifs sont terminés », et il doit y avoir de multiples préparatifs à effectuer pour lancer un spectacle aussi colossal que l'est ce ballet.
AURONS-nous des pensions pour les instituteurs? Le School Board de Londres l'a proposé. La National Teacher's League s'y oppose. Il ne faut pas confondre cet organisme avec la Fair Trade League. Son but premier consiste à réprimer la collaboration, ce que M. William Morris souhaite rendre obligatoire.
ON s'agitera l'an prochain contre la propriété domiciliaire revenant aux propriétaires qui louent depuis quatre-vingts ou quatre-vingt-dix ans des terres destinées à la construction, et aussi contre la façon actuelle d'évaluer le délabrement des immeubles et de rendre exorbitantes les réclamations des propriétaires à l'expiration des baux de sept, de quatorze ou de vingt et un ans.
LES CENDRILLON sont très à la mode en ce qui concerne les danses publiques auxquelles on souscrit. Au lieu du cotillon, pour lequel nous n'avons plus le temps, étant donné qu'il est de rigueur de fermer tôt, on pourrait présenter un jeu amusant de chasse à la pantoufle pour finir la soirée, et cela s'accorderait assez au titre de Cendrillon.
LE tollé en faveur de meilleurs logis pour les pauvres a entraîné le déménagement des fabriques, une honte en soi. Celle de St. Matthew, terrain communal de Bethnal, a ordonné aux propriétaires de 300 appartements délabrés de les mettre en bon état. On avait depuis longtemps le pouvoir d'adopter cette mesure, mais le conseil de fabrique n'avait pas bougé et, malheureusement, il cessera de faire son travail dès que l'opinion publique sera revenue au beau fixe.
DANS les cercles de théâtre, on a de plus en plus l'impression que la tournée de l'Amérique de M. Irving est une erreur. Bien sûr, cela veut dire un profit de 30 000 livres mais, sur le plan artistique, il est certain que cela lui occasionnera beaucoup de déceptions et de contrariétés. Les principaux journaux américains le respectent, comme nous le voyons par les critiques préférées qui ont été télégraphiées ici, mais le menu fretin des journalistes le maltraite vraiment.
M. CHARLES T. NEWTON, conservateur des antiquités grecques et romaines, a terminé l'agencement de la nouvelle galerie au British Museum. Elle contient les marbres du Mausolée, qui étaient autrefois éparpillés dans toute la collection, mais qui sont rassemblés pour la première fois. On espère que cette galerie, dont on effectue actuellement la décoration, sera prête à accueillir les visiteurs au printemps.
DEPUIS longtemps, les compagnies de tramways ont un œil sur la section de la route qui va de Hammersmith à Piccadilly Circus. Le pavé de bois vient d'être installé à grands frais, et cela pourrait constituer une surface singulièrement commode sur laquelle l'ingénieur du tramway pourrait opérer. Ce serait un jeu d'enfant que d'y mettre des rails quand les contribuables ont payé la note pour une grande part du travail préalable nécessaire.
UN DE CES JOURS, quelqu'un devra établir précisément ce que l'on peut considérer comme un juste service de vins pour chacun des invités lors d'un déjeuner. La question vient d'être soulevée quand vingt et un employés municipaux ont disposé de quarante-deux bouteilles de champagne lors du déjeuner du maire - exactement deux bouteilles par personne. Après une brève discussion, il fut décidé dans ce cas que deux bouteilles par personne ne représentaient pas une provision extravagante.
PEU de gens ont déjà été témoins d'une rencontre aussi splendide que celle qui a eu lieu à la Mansion House [résidence officielle du Lord-maire de Londres] afin de discuter de la question du Transvaal, étant donné les exigences des délégués du gouvernement Boer. Lorsque M. Forster a déclaré que, bien qu'il fût né quaker, il se battrait plutôt que de céder aux principales exigences des délégués, l'enthousiasme du public ne connut pas de bornes. Le gouvernement devra faire très attention à ce qu'il fait à ce sujet.
LE barreau s'inquiète du nouveau projet de loi de Lord Selbourn en vue d'établir de nouvelles cours de district, projet qui a été publié il y a un jour ou deux, et l'une des premières tâches du nouveau Comité du barreau actuellement en formation sera de fulminer contre lui. Lord Selbourn lui-même n'aime pas cette mesure qui est, en fait, la reprise du projet de loi de M. Joseph Cowen; mais comme il le dit de façon plausible, que peut-il faire? Il est pris entre l'arbre et l'écorce. Les provinces réclament à cor et à cri des séances continues.
LE marquis Tseng dit qu'il ne comprend pas l'engouement pour la porcelaine chinoise ancienne. Il ne peut comprendre pourquoi les Français, par exemple, préfèrent la broderie et la porcelaine chinoises aux leurs, qui gagnent quotidiennement en qualité. Il est assez naturel que la porcelaine chinoise ancienne ne soit pas une richesse inestimable aux yeux d'un Chinois. Il peut voir qu'à bien des égards le bric-à-brac européen est supérieur aux tasses et aux soucoupes de son propre pays. Mais la mode a décrété que la vaisselle chinoise était chic, et en dépit du marquis Tseng, les gens vont continuer d'être fidèles à leurs théières chinoises.
Image digitalisée de la page 411 : Condamné par les médecins [traduction]
« Est-il possible que M. Godfrey se soit levé et rendu au travail, et qu'il ait été guéri par un remède aussi simple? »
« Je vous assure que c'est vrai, il est complètement guéri grâce aux pilules Hop Bitters; il n'a plus rien; et il y a dix jours à peine, ses médecins l'avaient condamné et avaient dit qu'il allait mourir! »
« Eh bien, c'est une bonne journée! C'est remarquable! Je vais dès aujourd'hui m'en procurer pour mon pauvre George - je sais que ces pilules de houblon sont efficaces. »
Image digitalisée de la page 414 : La cure de l'Esthète [traduction]
I.
Jadis dépérissait un parfait Esthète calme et un peu fou,
Trop éthéré pour manger de la vulgaire viande,
Aussi a-t-il grignoté des lys,
Jusqu'à ce qu'il devienne abruti,
Et qu'il ne puisse discerner dans sa vie, bon gré mal gré,
À quel bout était sa tête ou son pied.
II.
Son médecin vint alors à son chevet et lui prescrivit le repos complet,
Et lui conseilla d'apporter un changement notable à ce mode de vie fleuri,
Il lui fit donc parvenir une plume
Qui lui servirait d'éventail par temps chaud et humide,
Et cela (ajouté au repos)
Fut ce qui apporta un réel changement à son mode de vie.
III.
De la même manière le jeune Esthète commença alors
À bredouiller avec rage : « C'est tout ce que vous pouvez faire? »
Esculape prit un air grave,
Puis lui conseilla de se raser,
Lorsque son patient s'exclama : « Vous n'êtes qu'un menteur, vieux filou! »
Et le fit trébucher avant qu'il ait le temps de dire « Hou! »
IV.
« Holà, mon jeune Esthète! Vous n'êtes pas vraiment malade,
Sinon vous n'auriez pas eu la force de me faire ce croc-en-jambe;
Je vous enverrai un bol,
Que vous devrez prendre seul,
Tant de chichis au sujet de nos honoraires vont nous mettre au chômage,
Vous ne nous payez pas pour vous garder malade! »
V.
« Maintenant, supposons que vous fassiez davantage d'exercice,
Et que vous vous débarrassiez de cette lueur éteinte dans vos yeux,
Marchez, courez,
Donnez-vous une allure resplendissante,
Et n'oubliez pas de laisser entrer le soleil dans votre "sombre tanière",
Voilà! - J'en ai fini avec mes "conseils"! »
VI.
Le jeune Esthète fut complètement abasourdi,
Puisque (chose étrange) il ne manquait pas d'intelligence,
Et il sentit qu'il pourrait se lasser
Du désir profond d'artifices,
Et même cesser d'admirer les jeunes filles grêles,
Dans la "symphonie" de leur robe souple et ample.
VII.
« Esculape, j'ai la nette impression que je retrouve peu à peu mes sens,
Car je ne suis plus aussi sérieux,
Plus du tout apathique,
Mais plutôt péripatétique,
Je "courrai" et je "lirai" jusqu'à ce que je devienne tout à fait athlétique,
Et extraordinairement intelligent. »
VIII.
« Adieu donc, lys, plumes et belles filles,
Adieu à mes désirs lassants, étranges, fades et tristes,
J'en ai plus qu'assez
De ces trucs esthétiques,
Et je vendrai mon costume au prochain abruti raté
À la recherche "d'âmes" et "d'affinités". »
IX.
Ainsi, de sa sombre tanière ornée de riches lambris il se détourna,
Se demandant maintenant comment il avait supporté
Une telle vie lymphatique
Ponctuée de rivalités tant affectées
Après d'infinis « riens » où règne la sottise
Voyez! Notre jeune Esthète est guéri!
F.J.M.
Image digitalisée de la page 414 : Une princesse qui spécule [traduction]
Les heureux Investissements d'une aristocrate Franco-Allemande
Pittsburgh (Penn.), le 28 nov. 1883
Selon des sources sûres, Marie Clémentine, de Saxe-Cobourg-Gotha, duché dont le duc était le frère du prince Albert, le mari de la reine Victoria d'Angleterre, ferait de la spéculation ici, dans ce pays. Il y a quelques années, cette dame, veuve très riche qui habite à Vienne, a commencé à acheter des obligations et des actions américaines par l'entremise d'une firme londonienne de banquiers et de deux capitalistes européens qui sont membres de familles très célèbres - les Dudley et les Ruthven-Pym. Les transactions financières de la princesse consistent en l'achat de titres, mais surtout d'obligations et d'actions de chemins de fer. La duchesse n'est pas une quelconque boursicoteuse et n'achète pas des parts de capital par centaines à la fois, mais par milliers. L'histoire ne dit pas si ses transactions financières ont été fructueuses, mais un gentilhomme bien informé au sujet de ses transactions a déclaré que chaque spéculation dont il a eu connaissance lui a rapporté de l'argent. Elle a des conseillers qui sont très au courant du marché financier et leurs achats dans chaque cas se sont avérés opportuns. En guise d'exemple, la princesse a acheté des milliers de parts de capital d'une compagnie de chemin de fer de Pittsburgh, il y a deux ou trois ans, lesquelles ont été vendues récemment avec un profit de 5 $ ou 6 $ l'action, outre les généreux dividendes que ses actions lui ont rapportés lorsque qu'elle les détenait. Sur les documents de transfert de cette part de capital, le notaire donne à la princesse le titre suivant : « Marie Clémentine de Saxe-Cobourg-Gotha, duchesse de Calabre, Vienne, veuve ». Une procuration qui accompagne les documents, et qui a été rédigée devant le consul américain à Vienne, est signée d'une écriture cursive fine et soignée : « Clémentine d'Orléans, princesse Auguste de Saxe-Cobourg-Gotha », et à côté du nom est apposé un simple petit sceau rouge sans pièce d'armoiries ou d'emblème. Gustave de Trebenge, chef de chancellerie ducale, et Auguste D. Wladory, cussier ducal, ont agi comme témoins lors de la signature. Le duché de Saxe-Cobourg, qui fait partie de l'Empire allemand, est riche et prospère. L'époux de la princesse est devenu duc, après que la lignée ducale de Gotha se fut éteinte en 1825, lorsque le duché fut donné à la Chambre de Cobourg-Saalfeld. La princesse elle-même est membre de la Chambre d'Orléans.
Image digitalisée de la page 414 : Marcolini [traduction]
Il était minuit.
L'imposante horloge avait sonné et l'écho résonnait encore sous les porches et dans les galeries du quartier Saint-Marc, lorsqu'un jeune citoyen, emmitouflé dans sa cape, accéléra le pas pour rentrer chez lui après avoir passé la soirée en compagnie de sa jeune maîtresse.
Le rythme léger de ses pas suivait la cadence des battements de son cœur.
Les parents de la jeune fille avaient consenti à leur mariage. On avait fixé la date de ce grand jour.
« Ma belle et douce Giulietta! » s'écria-t-il, « que soit béni ce jour où je pourrai enfin vous proclamer mienne! Quel homme est plus heureux que votre Marcolini? »
Mais alors qu'il prononçait ces paroles, il s'arrêta; quelque chose scintillait sur la chaussée devant lui.
C'était un fourreau magnifiquement travaillé; et cette découverte, que pouvait-elle être sinon un vrai coup de chance?
« Reste là! » s'exclama-t-il, en enfonçant le fourreau dans sa ceinture. « Si jamais quelqu'un te réclame, tu m'appartiens désormais! »
Puis, il reprit sa route d'un même pas cadencé, fredonnant le refrain de la chanson qu'il avait chantée avec sa Giulietta.
Mais nous ne savons jamais ce que la vie nous réserve.
Il tourna près de l'église de Saint-Geminiano, et après avoir fait trois pas il vit des hommes qui faisaient le guet.
Un terrible meurtre venait tout juste d'être commis.
On avait trouvé le sénateur Renaldi mort, sur le seuil de sa porte, le poignard planté au cœur.
Le pauvre Marcolini fut emmené de force pour un interrogatoire.
Le lieu, l'heure, tout servait à alimenter, à justifier les soupçons.
À peine était-il entré dans le poste de garde qu'il vit la preuve accablante qui jouait contre lui.
L'assassin, dans sa lutte, avait jeté son fourreau au loin.
Et l'avait taché de sang - du sang qui n'avait pas encore séché - et maintenant, ce fourreau pendait à la ceinture de Marcolini.
Tous posèrent les yeux sur ses nobles ornements.
Quand le couteau fatal fut produit et comparé avec le fourreau, plus aucun doute ne subsista quant à la culpabilité de Marcolini.
Il y a encore chez l'innocent une énergie, un sang-froid - une énergie lorsqu'il parle, un sang-froid lorsqu'il garde le silence - qui ne laissent personne indifférent; et le juge tarda quelque peu à prononcer la sentence, bien qu'il fut un ami proche de la victime.
Toutefois, à la fin, la sentence tomba, et Marcolini perdit la vie et sa Giulietta, sa raison.
Quelques années plus tard, la vérité éclata au grand jour, dans les derniers moments de sa vie, le véritable assassin confessa son crime; et de là est née cette coutume à Venise, une coutume qui prévaut depuis longtemps, celle qui veut que le crieur public implore la cour avant qu'elle prononce la sentence : « Souvenez-vous de ce pauvre Marcolini! »
Image digitalisée de la page 414 : Il s'agissait des serviettes de table [traduction]
« Monsieur! » répliqua le pauvre homme, s'efforçant de rester digne, à qui on avait demandé de faire un dépôt de cinquante cents auprès du caissier avant de prendre place à une table du restaurant, « le prix du blé est à son plus bas et le premier jour de ce mois plus de 30 000 000 de boisseaux attendaient d'être mis sur le marché. »
« C'est exact. »
« La récolte de pommes de terre a été très bonne, et le prix est bas. »
« Oui. »
« Le sarrasin est un tantinet plus ferme, mais il n'y a pas de quoi fouetter un chat. Le maïs a brûlé, mais les réserves sont suffisantes. »
« Je vois. »
« Sans doute peut-on obtenir du beurre, du bœuf et de la volaille à un prix qui n'a jamais été aussi bas depuis plusieurs années. Supposons que je doive vous battre pour un repas? La perte serait sans importance. »
« Mon cher monsieur », répondit l'autre, « vous faites une grave erreur. Ce ne sont pas les provisions que vous consommeriez, mais le fait que les serviettes de table ont augmenté de 10 cents par paquet de mille. Alors, veuillez nous garantir à l'avance. »
Image digitalisée de la page 414 : L'histoire pathétique d'un perroquet [traduction]
Il y avait en ville un marchand de fruits et de volailles qui possédait un perroquet sachant parler, et les propos originaux empreints de philosophie de cette créature à l'air entendu amusaient les passants. Le perroquet jacassait sans cesse et son propriétaire avait refusé, quelques mois auparavant, l'offre fort alléchante qu'un homme marié lui avait proposée en échange de l'oiseau qu'il voulait pour remplacer les bavardages de sa femme. Le marchand de volailles avait refusé catégoriquement de vendre son perroquet, mais avait confié à l'autre sur le ton de la confidence : « En fait, c'est d'ailleurs la raison pour laquelle je garde ce perroquet pour moi-même. Lorsque quelqu'un se met à râler, vous remarquerez que cet oiseau devient toujours furieux et prend directement le contrôle de ce papotage. Personne ne peut plus placer un mot. Et si par malheur vous jurez devant cet oiseau, alors là! c'est comme si vous aviez réveillé une demi-douzaine d'énormes taureaux en furie. Non, monsieur », ajouta-t-il, en regardant avec compassion l'autre homme marié, « je ne me départirai pas de cet oiseau à aucun prix, mais je vais vous servir une bière. »
Une histoire d'ovipare circule à propos du perroquet, histoire qui accabla systématiquement un Irlandais. Il n'avait jamais vu un tel oiseau auparavant, et il écoutait avec un vif intérêt les propos de cet oiseau intelligent depuis une demi-heure, non sans admiration.
« Quel oiseau étrange et magnifique, vraiment. Pond-il des œufs? » demanda-t-il au marchand.
« Oh oui! De temps à autre », répondit le propriétaire qui vit là une occasion de s'amuser.
« Pourriez-vous me vendre un œuf de cet oiseau? »
« Bien sûr! Si vous revenez dans un jour ou deux, j'en aurai un pour vous », dit le marchand de volailles et, sur ce, l'homme, tout heureux, s'en alla. Il revint le deuxième jour et demanda au marchand l'œuf qu'il lui avait promis. Le marchand avait oublié l'événement jusqu'à maintenant, mais pour réussir la blague qu'il préparait, il se dirigea vers l'arrière de son magasin et, prenant un œuf dans l'une des boîtes les plus proches, il l'enveloppa dans du papier et le remit à l'Irlandais, qui paya de bon cœur les dix cents demandés et quitta le magasin en affichant un sourire de satisfaction.
Deux ou trois semaines s'écoulèrent avant que le marchand de volaille revoie le client qui lui avait acheté l'œuf, puis un matin il le remarqua qui attendait sur le trottoir et contemplait le perroquet d'un air attristé mêlé de reproches. Il s'approcha ensuite du marchand et chuchota :
« Écoutez, monsieur. Savez-vous si votre oiseau sort souvent durant la nuit? »
« Eh bien! Je ne sais pas vraiment », répondit le marchand en réprimant difficilement un rire alors qu'il se doutait de ce qui suivrait; « votre oiseau doit prendre le large quelquefois. »
« Laissez-moi vous dire quelque chose à propos de cet oiseau », dit l'Irlandais sur un ton sépulcral - « il y a un canard qui l'a détourné du droit chemin. »
Image digitalisée de la page 414 : Divers [traduction]
LE menuet demeure encore le préféré lors des soirées mondaines et il est vrai que la façon dont on le danse maintenant, avec une telle habileté, une telle minutie et avec tant de grâce, justifie le fait que cette danse demeure toujours la favorite. Les costumes de l'époque de Louis XV sont de rigueur lors des nombreux bals et personne ne s'y oppose, puisqu'ils ajoutent l'élégance à la grâce.
ON a suggéré que des arbres soient plantés à la place Portland de chaque côté de la route. Cela ajouterait peut-être un petit quelque chose à son caractère rural, mais à peine à sa beauté, et les arbres ruisselant de pluie n'ont rien d'agréable dans les rues très passantes. De plus, la croissance de tels squelettes comme sait en produire Londres n'offre même pas un abri par temps pluvieux.
MADEMOISELLE THACKERAY aurait dû ajouter à ses chroniques personnelles portant sur le poète lauréat le petit incident suivant, lequel nous est parvenu de Copenhague. Lorsqu'il fut invité à dîner au palais, M. Tennyson n'a pu accepter l'invitation pour la seule et unique raison qu'il n'avait pas avec lui de veston habillé.
LA visite de Lord Coleridge au pays aura été fructueuse, puisque l'on planifie d'instaurer un système de cours régionales un peu partout en Angleterre, selon le modèle des États-Unis. Cette proposition fut accueillie si favorablement que Coleridge a rédigé un projet de loi et que le cabinet l'a adopté.
LORD SALISBURY a cru nécessaire de dissiper certains malentendus concernant sa propriété de Londres. Il dit qu'il ne faudrait pas croire que les rues qui portent les noms de sa famille lui appartiennent nécessairement. Elles ont déjà appartenu à sa famille, mais ses ancêtres étaient tellement dépensiers que la majeure partie de la propriété a été vendue et, aujourd'hui, l'empire des Salisbury dans la métropole est très petit; d'ailleurs, il ne fait partie d'aucun des quartiers surpeuplés.
LE musée Borgia, à la Propagande, à Rome, fondé par le cardinal Borgia au début du siècle et qui renferme des collections numismatiques, géographiques, ethnographiques et paléographiques très riches, a tout récemment été agrandi par l'addition de plusieurs salles spacieuses au deuxième étage de la Propagande. Le musée est continuellement enrichi grâce aux contributions des missionnaires de partout dans le monde.
L'AUTRE jour, la cour des Tuileries a été transformée en base de mise à l'essai. En effet, les lieux de cet opéra ont été enduits d'une matière incombustible. Les flammes qui se sont élevées (des endroits qui n'avaient pas été préalablement traités avec la solution ignifuge) ont alarmé le voisinage tout entier et la plupart des gens du quartier se sont rappelé ce triste événement qui s'était déroulé il y a plusieurs années. Quant au décor, qui avait été traité avec la solution, l'expérience fut un succès; désormais, rien ne pourrait le brûler.
LE dernier potin qui a fait jaser les gens concerne le sherry qui fermente et les sandwichs que l'on trouve dans les sacristies et on nous a affirmé que le bon vin, et servi en grande quantité, n'est pas chose rare dans les églises de la ville. Oui, vraiment, elles ont leurs propres caves à vin comme celles que l'on retrouve dans les bonnes maisons; en cela, les seigneurs sont comme les profanes et ont leur penchant et, à vrai dire, ils sont plus avantagés puisqu'ils peuvent obtenir ce qu'ils aiment sans avoir à payer. On dit que certaines caves à vin dans les sacristies des églises contiennent des vins valant plus de 50 livres la bouteille.
LA mode des enveloppes, qui sont magnifiques et élégantes, a quelque chose d'exceptionnel. Elles sont faites de papier vélin d'un blanc pur et sont liées aux quatre côtés par un ruban d'une couleur au gré de sa fantaisie, que l'on noue et que l'on scelle à l'aide de cire de la même teinte que le ruban. Cette opération s'effectue avant que l'on inscrive l'adresse de manière que celle-ci puisse être lisible en entier. Selon les conventions en vigueur au sein de la haute société, dorénavant, on laissera tomber les mots monsieur et madame avant les titres et il sera convenable d'écrire Baron de V---, Marquis de B---, et ainsi de suite.
LE tricycle aurait, a-t-on découvert, davantage d'utilités. Les propriétaires de l'un des quotidiens de Londres ont conçu un tricycle muni d'un vaste panier carré recouvert d'un tissu imperméable du même rouge éclatant qu'arborent les voitures postales et les boîtes aux lettres du ministère des Postes. Ce panier est un accessoire qui servira à leurs services de livraison dans la région métropolitaine. Le panier étant placé à l'avant du chauffeur, son contenu demeure à la vue de ce dernier. Voilà donc une bonne idée que le ministre des Postes devrait prendre en considération en ce qui concerne la livraison de colis postaux.
LES Romains s'opposent à l'éclairage électrique - ils en ont une sainte horreur et n'y voit pas le côté pratique. À Rome, les gens qui aiment l'obscurité chantent à l'unisson des hymnes condamnant l'électricité. Il est clair que les Romains doivent encore aller de l'avant, mais n'avons-nous pas aussi l'esprit un peu étroit? Plus près de nous, l'inventeur du gaz n'a-t-il pas été victime de mépris et de menaces? Franklin a découvert la lumière dans la peur et en tremblant, et Stephenson en a eu des sueurs froides. Les gens en faveur de l'électricité ne seront pas réprimés, mais ils insisteront pour que certaines parties de la ville de Rome soient électrifiées. En tout cas, l'idée semble plaire au roi.
LA question concernant l'octroi d'une pension à la veuve de feu le commandant Moncrieff, qui est mort lors d'un combat contre les Arabes à Suakim, a fait l'objet d'une vive discussion entre l'Amirauté et le Foreign Office; aucune de ces autorités n'a voulu prendre la responsabilité de la noble action de cet officier qui a connu une fin tragique. Comme toujours, quand subsiste le moindre doute lorsqu'il s'agit d'une question de générosité, nos autorités sont toujours disposées à suivre le conseil des sages philosophes, c'est-à-dire : « Dans le doute, abstiens-toi » et, par conséquent, l'octroi d'une pension a été refusé. Feu Lord Beaconsfield n'aurait pas hésité un seul instant s'il avait eu à décider d'une telle affaire.
UN événement curieux est survenu la semaine dernière, à savoir l'enterrement d'un journaliste qui, dans ses dernières volontés, avait demandé qu'un joueur d'orgue de Barbarie italien fasse partie du cortège funèbre qui accompagnerait sa dépouille. Cela est tout à fait paradoxal lorsqu'on sait que l'homme de lettres britannique plus nerveux avait toujours eu en aversion ce charmant instrument de musique! Pour ce Français, la vie était une partie de plaisir; il a fait beaucoup d'argent et l'a dépensé librement en s'amusant au plus haut point. Pour témoigner son amitié aux gens de sa profession, il a envoyé des invitations en provenance de l'au-delà (qu'il avait préparées avant de mourir) à de nombreux journalistes pour assister à un dîner donné après ses funérailles, dans un hôtel de première classe. Le coût de ce dîner devait être payé à même les fonds gérés par ses exécuteurs testamentaires et le défunt avait demandé à ce que rien ne reste à la fin du repas. Voilà une idée originale pour que les gens se souviennent de vous.
DANS votre article rédigé en des termes très fougueux, M. de Rosaury, auriez-vous l'obligeance de nous informer lorsque vous faites des remarques cinglantes à l'endroit de la puissance russe? Ou êtes-vous si étroit d'esprit que vous tiriez, par conséquent, de telles conclusions « médiocres », parce que vous vous exclamez « Bénie soit la Russie, son influence sur nous ne peut être que bénéfique alors que celle de l'Allemagne est tout sauf satisfaisante. Cette dernière vole notre commerce, affame nos ouvriers en fabriquant des objets qui imitent ceux de Paris, tandis que la Russie nous envoie de la nourriture et du pétrole, du bois de chêne magnifique et la célèbre poudre qui permet de guérir les désordres nerveux - l'extrait qui redonne aux cheveux gris leur couleur noire ou brune d'antan, les emplâtres pour soigner les cors, la liqueur réputée pour soigner des indigestions », et ainsi de suite. Que répondent messieurs les grands ducs à cela? Ils apprécieront la plaisanterie, puisqu'ils savent la reconnaître lorsqu'ils en voient une. Mais Monsieur l'écrivain sait-il reconnaître une plaisanterie lorsqu'il en écrit une?
CE sont les volcans. Nos couchers de soleil sont causés par des éruptions volcaniques. Le magnifique rougeoiement pourpre qui embrase le ciel et qui donne à toute notre architecture londonienne une allure spectrale vient de Java. Selon un expert en la matière, ce phénomène est causé par la présence de poussière volcanique dans la région, au-dessus des plus hauts nuages. « La nature vacuolaire de la lave, chaque particule consistant en une petite bulle de verre, lui permettrait, après avoir été expulsée par l'éruption à une hauteur prodigieuse, d'être transportée sans précipitation aux quatre coins de la planète, et à l'altitude qu'elle atteint elle serait très loin de l'action de la vapeur et des conditions atmosphériques. Outre cet éclat diffusé dans l'atmosphère après le coucher du soleil et une ou deux heures avant le lever du soleil, il n'existe rien de pareil qui eût été observé auparavant, et un phénomène aussi étrange doit trouver ses origines dans une cause tout aussi étrange. Avant-hier soir, le verre, qui était de couleur ambre, n'a étincelé qu'une heure après le coucher du soleil, qui était partiellement obscurci par les nuages. » Ces nuages nous sont sûrement venus d'un certain endroit qui se situe plus près que Java.
LORS d'un récent dîner donné à l'un des plus vieux manoirs anglais, la table était magnifiquement dressée et ornée dans un style unique. Le centre était couvert d'un grand plateau en miroir orné d'une bordure en argent de style Louis XIV, monté sur des pieds bas de cerfs en argent, de sorte qu'il s'élevait un peu au-dessus de la nappe. Le miroir était parsemé de fleurs coupées et de feuillage, et sur ce lit on avait disposé de petits groupes de figurines en porcelaine de Saxe à demi-masquées par des berceaux de verdure, des glaïeuls et d'autres plantes de grande taille. Une gerbe de fleurs inodores ornait l'assiette de chaque convive et une autre gerbe minuscule ornait chaque verre à champagne. Des figurines miniatures en argent représentaient des jardiniers poussant devant eux une petite brouette contenant le sel et le poivre, et les cuillères avaient la forme de petites pelles dorées. Le menu avait été écrit sur une feuille ivoire, en caractères gothiques rouges; on y avait apposé un sceau de couleur rouge corail et on l'avait noué d'un ruban. Une bouteille de parfum en verre ciselé, du même type que les verres à vin, avait été remplie de parfum et placée à la place réservée aux dames invitées, à l'intention de celles qui avaient en aversion l'odeur du gibier.
COMMENT TOMBER MALADE - Ne vous couvrez ni le jour ni la nuit, mangez trop, ne faites pas d'exercice, travaillez durement sans vous reposer, visitez le médecin à tout moment, prenez tous les ignobles remèdes de charlatans dont on vante les mérites et alors là vous voudrez savoir
COMMENT RECOUVRER LA SANTÉ - Question à laquelle on répond en quelques mots - Prenez des Hop Bitters.
Image digitalisée de la page 415 : L'année qui trépasse [traduction]
Un nuage paraît à l'horizon venant de l'ouest aux reflets dorés,
Une cloche sonne rompant le silence de l'air.
Le dieu soleil, mettant à l'épreuve ses dernières forces, s'éclipse précipitamment,
Empourprant ce nuage qu'il poursuivait de ses rayons ardents;
La beauté du jour ainsi, pour un temps, suspendue.
« Quelles couleurs magnifiques l'année revêt pour passer de vie à trépas! » dirent-ils;
« Le rougeoiement du soleil couchant plus longuement persiste,
Sachant qu'à cette année, bientôt, plus rien ne subsiste,
Emportant avec elle ses moments tristes - ses doux moments s'enfuyant -
Alors que l'on sonne les vêpres à la tombée du soir. »
« Quelle tristesse lorsque cette année naquit! » dirent-ils.
Dans le crépuscule, émerveillé, j'ai tendu l'oreille.
Pour moi, l'année qui doit remplacer
Cette vieille amie maintenant trépassée,
N'apportera jamais autant de merveilles.
Les nuages que le soleil embrassait pâlissent, se teintent de gris.
Le son des cloches suspendues entre ciel et terre,
Attendant de carillonner pour saluer le départ de l'année,
Sur un air qui ne fut jamais si gai et si gris,
Pour moi alors que je suis là à l'écouter.
Oh! cœurs qui battent par millions à l'unisson!
Oh! lèvres qui prononcent inlassablement cette vieille et même phrase!
Je m'étonne qu'il ne reste jamais de tristesse
Dans ces mots que vous prononcez à vos amis et à vos invités
En ces jours singuliers qui marquent la nouvelle année!
Est-ce cette même histoire qui toujours se répète?
Ne peut-on avoir de nouvelles années avec seulement des accents plus joyeux?
Pour toujours et à jamais je persiste à croire
Qu'aucun nouveau visage ne peut être plus doux à voir
Que ceux du passé que nous avons trouvés.
* * * * *
À l'ouest, dans le ciel qui s'est obscurci, plus aucun nuage,
La cloche s'est tue dans l'air embrumé.
L'année tire sa révérence avant son dernier long voyage,
Et moi, qui l'ai tant aimée et qui l'ai connue mieux que quiconque
Je la reverrai - Dieu seul sait où!
Image digitalisée de la page 415 : Notre chronique sur les échecs [traduction]
À nos envoyés spéciaux
À J.W.S., Montréal. - Lettre et article à remettre.
Avons reçu la bonne solution du problème no 463.
C.E., de Saint-Gilles, Sorel, P.Q. - Avons reçu votre lettre.
Merci beaucoup de nous avoir soumis ces problèmes. Cependant, nous les avons reçus trop tard pour les insérer dans la chronique d'aujourd'hui.
Dans un article paru il y a environ une semaine ou deux, nous avions comparé le meilleur jeu des joueurs d'échecs professionnels d'aujourd'hui à celui des grands maîtres, il y a soixante ou quatre-vingts ans. Au cours des derniers jours, nous sommes tombés par hasard sur un article fort agréable à lire portant sur ce même sujet, qui avait paru dans le « Milwaukee Sunday Telegraph ». Il est évident que cet article a été rédigé par quelqu'un qui s'intéresse vivement au sujet, et nous nous excusons de ne pouvoir vous le présenter en entier. L'auteur disait : « Si nous jetons un coup d'œil aux archives qui ont trait au jeu d'échecs, nous ne pouvons faire autrement que de nous demander si ces géants de l'époque, qui se sont affrontés sur un damier leur servant de champ de bataille, pourraient remporter la victoire sur les experts contemporains. Les méthodes et les techniques actuelles dont on se sert lors d'affrontements ont grandement évolué. Les forteresses qui, au siècle dernier, étaient imprenables, » fondraient « comme neige au soleil sous les tirs d'un artilleur moderne. Comment cela se passerait-il si Steinitz rencontrait Deschappelles? Qui remporterait la partie entre Philidor et Blackburne? » Plus loin, il ajoute : « Plusieurs des parties disputées par Philidor ont été conservées, et si nous retournons dans le temps, il y a quatre-vingts ans, il nous est possible de juger de sa force. Le passionné d'échecs devrait revoir ses parties; il serait bien embarrassé de déterminer qui serait le gagnant entre Blackburne et Philidor. Mais si Deschappelles était encore vivant, comment s'en sortirait-il s'il avait Steinitz pour adversaire? Pour nous, la question demeure ouverte. De toute façon, nous sommes prêts à nous laisser convaincre. » Il est clair que, par ces extraits, l'auteur refuse de clore le sujet et, sans aucun doute, de façon judicieuse. Il est aujourd'hui impossible de résoudre cette question en organisant une partie. Les joueurs modernes sont là, mais les héros de l'époque ne sont plus, mais ils ont tout de même légué quelques exemples de leur talent pour enrichir notre documentation sur les échecs. Les parties disputées par Philidor et celles disputées entre La Bourdonnais et McDonnell, tous deux de grands et d'excellents joueurs d'échecs qu'il serait intéressant de comparer avec les joueurs d'échecs modernes, procureront toujours un plaisir intellectuel aux joueurs d'échecs néophytes, mais cela prendra du temps et une étude minutieuse avant que nous puissions nous prononcer sur leurs mérites lorsqu'on les compare aux meilleures parties disputées de notre époque. Il se pourrait bien qu'il faille également prendre en considération le fait que le joueur professionnel d'aujourd'hui n'était pas connu il y a soixante ou quatre-vingts ans. Selon l'article que nous avons cité, Philidor donnait vraisemblablement des leçons d'échecs, mais il était musicien de profession. À son époque, le jeu d'échecs était considéré comme un passe-temps intellectuel et tous les hommes de bonne éducation devaient, à tout le moins, en connaître les rudiments, et la plupart des parties étaient disputées au sein du cercle social. Tous ces aspects doivent être pris en considération si nous voulons en arriver à une conclusion en ce qui concerne la force des joueurs de cette époque en comparant leur jeu à celui de nos experts contemporains. Tout compte fait, le sujet est intéressant et mérite réflexion, ce qui sera fait sans aucun doute, puisque l'excitation qui entourait les tournois d'échecs n'est plus à la mode et qu'elle a été remplacée par le plaisir de mener tranquillement une recherche sur l'histoire du jeu d'échecs.
Image digitalisée de la page 415 : Visite du Dr. Zukertort [traduction]
La nouvelle annonçant la visite au Canada du Dr Zukertort, le célèbre joueur d'échecs que l'on a fait connaître par l'entremise de ces chroniques il y a quelques jours, a été accueillie avec grand plaisir par nos passionnés d'échecs du pays. Les villes qu'il visitera probablement sont Toronto, Niagara Falls et Montréal. Depuis l'annonce de sa visite, la Dominion of Canada Chess Association a fait parvenir une invitation au docteur pour participer à son tournoi qui aura lieu à Ottawa lors de la prochaine session parlementaire. Il ne s'est pas encore écoulé suffisamment de temps pour que nous ayons reçu une réponse à l'invitation, mais comme le Dr Zukertort, pour autant que nous le sachions, n'a aucune partie prévue durant cette période, il est fort probable qu'il acceptera d'y participer.
Une lettre adressée à M. Zukertort, aux soins de ce bureau, a été envoyée à son adresse à New York.
Le Dr Zukertort, en réponse au défi lancé par M. Steinitz de jouer une partie avec le cercle de joueurs d'échecs de Paris lorsque ce dernier sera de retour en Europe, a répliqué en ces termes : - « Je ne propose pas à M. Steinitz de jouer à l'extérieur de Londres. Aucun de nous deux n'est membre du cercle de joueurs d'échecs de Paris. C'est une erreur de croire que je ne jouerai qu'avec le cercle de St-George, dont je suis le capitaine. Je jouerai avec M. Steinitz dans tout cercle respectable de joueurs d'échecs de Londres. » - Toronto Globe.
Image digitalisée de la page 415 : M. Blackburne à Newcastle [traduction]
Ce mardi 13, à Newcastle-on-Tyne, M. Blackburne a joué 22 parties en même temps, en a remporté 19, en a perdu une (contre M. F. Downey) et a fait deux matchs nuls (avec respectivement Mlle Kate Spence et M. J. Campbell). Ce jeudi 15, il a joué huit parties en même temps et les yeux bandés, au Newcastle Art Gallery. Il a remporté cinq parties, en a perdu une (contre M. Zellner) et a fait deux matchs nuls (avec respectivement M. J. Nicholson et M. W. Park). - Glasgow Herald.